Après la belle réussite de « Pauvres créatures » en ce début d’année, Yorgos Lanthimos revient rapidement (trop ?) avec une de ses œuvres les plus faibles ; son enchainement depuis « The Lobster » étant un sans-faute pour ma part.
Il faut dire que le film à sketch est un des genres les plus bancals et difficiles du cinéma : on assiste ici à une succession de segments inégaux trop courts (ou trop longs au choix). Il est bien difficile de de se sentir impliquer face à ce beau théâtre de marionnette qui peine à donner une progression dramatique et du sens à l’ensemble. On est certes dans un cinéma de l’absurde mais il est frustrant de ne pas réussir à comprendre où veut venir le cinéaste. On peut éventuellement faire un lien thématique entre les 3 histoires qui s’attachent à dépeindre des êtres perdus mentalement à la recherche d’un sens à leur vie et d’une certaine forme d’affection (d’où le titre ?). Cela se traduit par des relations toxiques qui détruiront, sous différentes formes, les protagonistes.
Au jeu des comparaisons entre les parties : la première apparait comme la plus faible, presque banale dans intrigue (pour du Lanthimos en tout cas !) et assez mou ; le second est peut-être le plus réussis : on y retrouve le ton chirurgical et l’humour à froid et caustique de la « Mise à mort du cerf sacré ». Le 3ème est le plus grotesque offrant quelques images intéressante (la cérémonie des larmes) mais avec une conclusion décevante.
Seul point commun évident entre les histoires (en dehors des thématiques évoquées ci-dessus) : la qualité du trio d’interprètes même si je dois avouer que le phénomène Jesse Plemons (aka « Meth » Damon) continue de m’échapper. Il est ici très bon dans les segments 1 et 2 (et plutôt effacé dans le 3) mais je ne le trouve jamais exceptionnel (sans avoir vu le reste de la compétition, son prix d’interprétation à Cannes parait un peu exagéré). Quant aux 2 rescapés de « Pauvres Créatures » (voir 3 si on compte la belle Margaret Qualley) : Emma Stone (en retrait dans l’histoire 1) et Willem Dafoe (et lui moins présent dans la n°2), ils sont tous les deux impeccables : la première n’hésitant pas une nouvelle fois à s’enlaidir et à dépasser ses limites et le second (n’ayant plus rien à prouver avec sa filmographie monstrueuse) démontrant une nouvelle fois son talent de caméléon et son habilité à jouer des personnages « bordelines ».
Pour faire court (contrairement au film) : il est dommage de voir une somme d’autant de talents (réalisateur et acteurs) se perdre dans une entreprise aussi vaine.