A peine un an après la sortie (couronnée de succès) d’ «Une Etrange Affaire», Pierre Granier-Deferre s’attaque à une nouvelle adaptation d’un roman de Jean-Marc-Roberts - «L’Ami de Vincent». Un projet initié par le producteur Alain Sarde, qui a failli pourtant ne jamais voir le jour. Le cinéaste vit à cette époque, un drame terrible. Il vient en effet de perdre sa femme et très atteint, a décidé de mettre sa carrière entre parenthèses.
Mais grâce à la force de persuasion de son ami Roberts et de son complice scénariste Christopher Frank, Granier-Deferre accepte finalement de faire le film.
L’écriture du scénario s’avèrera plus difficile que prévue, «affectée» par la mélancolie du réalisateur. C’est tout d’abord Michel Piccoli qui devait former le duo d’amis avec Philippe Noiret mais devant les réticences de la production, Granier-Deferre se tourna finalement vers Rochefort. Un choix somme toute logique car l’acteur entretient déjà de forts liens d’amitié avec Noiret.
Granier-Deferre le dira lui-même, il effectuera les prises de vues dans un état presque second, toujours très touché par la disparition de sa compagne. Il admettra également être plus intéressé par les nombreux personnages qui traversent le film que par son histoire qu’il ne l’inspire finalement, pas plus que cela. Pourtant, ce retour dans le passé d’un homme à priori ordinaire, n’est pas sans intérêt. Une plongée qui se fait grâce à une succession de rencontres entre cet ami, interprété avec beaucoup de finesse par un excellent Noiret, et toutes les femmes qui ont traversé la vie de son ami (Toujours impeccable Rochefort). Peu à peu, cet ami (et nous avec) va découvrir le côté sordide de cet homme qu’il croit connaitre, séducteur abjecte, capable des pires horreurs.
Une certaine tristesse traverse ce film. De toute évidence, Granier-Deferre filme au travers cette superbe galerie de personnages, sa propre dépression.
Dommage que cette histoire tourne finalement un peu en eau de boudin, s’achevant un peu n’importe comment. On a du mal également à comprendre ce que ressent réellement cet ami. Incompréhension ? Dégout ? Ou simple déception ? On ne le saura finalement jamais.
«L’Ami de Vincent» reste malgré cela un superbe film d’acteurs et d’actrices (mention spéciale à Françoise Fabian, Marie Dubois, Jane Birkin et Anna Karina) magnifiquement filmées par Granier-Deferre.