Noventa y nueve mujeres constitue sans conteste l’une des grandes réussites de Jess Franco, tant par les élans de mise en scène capables de poétiser voire de sublimer les enjeux d’un récit tourné, au contraire, du côté de la laideur. Les exactions imposées aux détenues ne sont pas explicitement montrées, prises en charge par une esthétique du détour et par un goût pour la métaphore ; la caméra refuse ainsi toute fétichisation du pouvoir, s’attache plutôt aux relations entre les prisonnières qu’elle retranscrit avec pudeur – qualité que nous ne connaissions pas au cinéaste !

Cette douceur n’empêche pas la radicalité d’une œuvre qui, dans son dernier acte, retranscrit avec intelligence les mouvements de révolte qui résonnent avec l’actualité de l’Espagne de la fin des années 60. Envoyée sur place pour constater les abus, la jeune inspectrice Leonie souhaite imposer un assouplissement des règles de détention mais obtient, sans le vouloir, l’inverse de son projet : la mutinerie figure un chaos inacceptable par les autorités et sera punie par un retour à l’ordre plus féroce encore, sous le prétexte de cet appel au chaos. Dans la dynamique entre ordre établi et contestation se problématise la notion de dissidence : chercher à renverser un système politique autoritaire par le désordre, n’est-ce pas contribuer à son renforcement voire à son durcissement ? Le film intéresse et saisit le spectateur, annonce le Salò o le centoventi giornate di Sodoma (Pier Paolo Pasolini, 1975) qui sortira six ans plus tard, ainsi que le sous-genre japonais des films de séquestration érotique façon La Femme scorpion (Shun’ya Itō, 1972).

Créée

le 28 mai 2025

Critique lue 12 fois

Critique lue 12 fois

D'autres avis sur L'amour dans les prisons des femmes

L'amour dans les prisons des femmes
YgorParizel
5

Critique de L'amour dans les prisons des femmes par Ygor Parizel

Ce film s'inscrit dans le sous-genre (celui des "femmes en prison") d'un sous-genre (sexploitation), mais il a cela d'intéressant qu'il relançait la mode (des dizaines de productions à travers le...

le 26 juin 2019

1 j'aime

Du même critique

Sex Education
Fêtons_le_cinéma
3

L'Ecole Netflix

Il est une scène dans le sixième épisode où Maeve retrouve le pull de son ami Otis et le respire tendrement ; nous, spectateurs, savons qu’il s’agit du pull d’Otis prêté quelques minutes plus tôt ;...

le 19 janv. 2019

90 j'aime

17

Ça - Chapitre 2
Fêtons_le_cinéma
5

Résoudre la peur (ô malheur !)

Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point...

le 11 sept. 2019

79 j'aime

15