L'Epée de Kamui
7.3
L'Epée de Kamui

Long-métrage d'animation de Rintarô (1985)

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Le héros et moi, on a la même coupe de cheveux.

La japanimation moderne est un art surchargé : pour un anime au moins bon, il y en aura 10 au mieux médiocres faits juste pour remplir le temps d'antenne et, au passage, grappiller un peu de l'argent de poche de l'otaku moyen à coups de fan-service putassier, et que chacun aura oublié au bout de 2 mois.
Ce serait sympa, donc que l'industrie de l'animation nippone décide un jour de produire moins d'anime pour les faire mieux, et que les amateurs de ce média en voient moins pour ne regarder que la crème.
Histoire de vous faire passer le mauvais souvenir d'une purge intergalactique comme Sword Art Online ou Darling in the Franxx, je vais vous parler du film d'animation (trop) méconnu que voilà.


Près de 10 ans de gestation ont été nécessaires au sein du prestigieux studio Madhouse pour aboutir à cette pépite nommée Kamui no Ken (ou l'Epée de Kamui, dans la langue de Proust et PNL), adaptation d'un roman du même nom de Tetsu Yano, qui nous conte durant la période mouvementée du Bakufu (transition effectuée au cours du XIXème siècle entre un Japon féodal, dirigé par les Tokugawa, et un Japon plus moderne et ouvert au monde), la quête de vengeance de Jirô, un enfant qui deviendra un épéiste surpuissant, qui a vu sa famille exterminée par Tenkai (personnage intéressant que ce moine bouddhiste, censé être du fait de sa fonction un parangon de bonté, et qui se révèle être un sommet de cruauté et d'immoralité) et ses ninjas, et son épopée pour découvrir un fabuleux trésor que convoitent également l'antagoniste et sa troupe de ninjas assoiffés de sang.


Sur près de 2 heures, c'est un film triste particulièrement dense, généreux et foisonnant de personnages qui s'offre à nous, ponctué de combats entre ninjas aussi inventifs que sanglants, mais surtout fichtrement bien animés (l'animation est certes pas aussi fluide que dans un mastodonte avec tout plein de budget comme Gundam : Char's Counterrattack, mais quand même) et sertis par la réalisation psychédélique de Rintarô, super colorée et qui expérimente des tonnes de choses (à un moment, par exemple, on a droit à la technique du split-screen, à d'autres, la musique guerrière s'arrête à certains moments décisifs des combats pour montrer leur importance, à d'autres, les couleurs changent drastiquement pour montrer l'intensité des batailles), je retiens surtout le face-à-face final, mais aussi le court combat dans une soufrière entre Jirô et une ninja, où le héros doit déjouer des illusions par la seule force de sa concentration.
Et comme si ça suffisait pas, le sound-design souligne davantage la vitesse et la férocité des combats, avec des super bruitages pour les épées et les shurikens.


Le film, porteur d'une philosophie assez bouddhiste, fait même entrer en scène la civilisation aïnoue (peuple chasseur-cueilleur de religion animiste qui vivait principalement au nord du Japon, dans l'Île d'Hokkaidô, victime d'un énorme racisme, et qui fut décimé par la colonisation japonaise), sous-représentée dans les récits historiques japonais, et met en opposition leur mode de vie paisible à celui du reste du Japon, qui commence à se déchirer dans des guerres pour l'ambition et l'argent des abonnés, et il fait pareil lorsque Jirô va sur la côte ouest américaine lors du second tiers de l'intrigue, avec les amérindiens et les colons blancs qui les exterminèrent, à l'instar des Cheyennes (réalisé par John Ford en 1964) et de Danse avec les Loups (réalisé par Kevin Costner en 1990).


Un chef-d'oeuvre de l'animation vraiment pas assez connu, et que je vous recommande absolument.
Faut dire, le trailer donne sacrément envie : https://www.youtube.com/watch?v=0V3opJT4mfk
D'ailleurs, il y a des références à Kamui no Ken dans Kill la Kill : https://www.youtube.com/watch?v=jI0Ei61bbNA
L'OST tabasse, aussi : https://www.youtube.com/watch?v=dS232jBVnAU


Note : 8,5.

Créée

le 16 nov. 2019

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