Le cinéma aime bien cultiver des phobies et la vieillesse est un peu devenue le nouveau sujet tabou du monde contemporain comme un spectre qui nous guette tous et auquel nous nous retrouvons confrontés tôt ou tard. Il convient donc de repousser l’âge fatidique par n’importe quel moyen (chirurgie, filtre photos, produits de beauté) de peur de finir ses jours ridés, sénile, recroquevillé sur son lit d’hôpital, ou de finir par agoniser dans une maison pour moribonds. On a notamment vu débouler Relic dernièrement qui associait cette crainte du temps qui passe, de la peur de vieillir et de voir son corps se flétrir. L’étrange cas Deborah Logan traite pour sa part de la dignité des personnages âgés face à la maladie dégénérative de l’Alzheimer qui pousse ceux qui en sont atteint à confondre leurs pot d’Activia avec un saut de Ripollin, ou bien de faire sécher le papier toilette sur la radiateur après s’être frotter le cul avec. Le sujet était idéal à associer au thème de la possession avec ce que cela implique de démence et de crises hystérique d’autant que le genre revient en force depuis le succès du Dernier Exorcisme qui a ré-ouvert la brèche vers laquelle s’engouffre tous les exécutifs afin de prêcher les convertis aux Found Footage. Ce genre s’y prête d’ailleurs plutôt bien d’autant qu’il requiert moins de moyens pour des retombées financières garanties. Le film prend donc la forme d’un documentaire sur les effets lié à la pathologie de Deborah Logan et de ses conséquences désastreuses sur son entourage. Le réalisateur prend le temps d’exposer sa situation avec ce que cela comporte d’éléments dramatiques face à l’annonce du diagnostic et d’adaptation au quotidien. Certaines scènes pourront éventuellement heurter la sensibilité de certains spectateur un peu fragile face au voyeurisme malsain suscité par l’intimisme du procédé mais le but reste moins d’appuyer une thèse médicale que d’opérer un rapide glissement de ton vers l’épouvante horreur.


Les événements paranormaux ne tarderont donc pas à se manifester à mesure de l’aggravation des symptômes de la matriarche ce qui nous amènera naturellement à faire le lien avec une origine surnaturelle d’autant que la communication du film reposait moins sur l’argument d’un twist scénaristique contrairement à The Visit sorti un an plus tard et évoquant plus ou moins le même sujet. Dommage, car le film avait réussi à se bâtir une crédibilité, en plus de proposer une vrai réflexion avec juste ce qu’il fallait d’ambiguïté. Mais dès l’instant que l’on verra la vieille harpie passer du sol au plafond en un battement de seconde ou bien la fenêtre de la maison s’ouvrir par télékinésie, le film perdra considérablement de son intérêt, et les habituels comportements irrationnels des personnages ne viendront certainement pas l’aider à s’en relever. Pour ne rien arranger, le recours au found footage ne sera pas toujours pleinement justifié comme on le verra lors d‘une tentative de meurtre dans une chambre d’hôpital qui alterne différentes prises de vues sans que l’on ne puisse jamais discerner les caméras dans le champs, et je ne parle même pas des plans de sécurité volés. À cela s’ajoute l’habituel programme horrifique emprunté aux canons du genre qui ne fait jamais dans la finesse ou l’originalité, si bien que l’on ne sursautera jamais vraiment face à ses artifices communs. C’est quand même bien dommage après le portrait dressé de ces personnages, notamment de la fille toujours avec une flasque de whisky dans les mains, ce qui aurai pu soulever une négligence évidente dans la surveillance de sa mère, notamment lorsqu’elle va se mettre à dévorer sa collection de porcelaine ou bien le jardinier que l’on voit passer ses journées à remuer la terre et que l'on verra ensuite s’entraîner à tirer au fusil sur le van du caméraman suite à une crise de folie passagère.


Le réalisateur préfère donc s’intéresser à une sombre histoire de malédiction et de rite sacrificielle surligné à gros traits et trop vite expédié. Il devient vite évident que cela aura un rapport avec l’état de la matriarche qui sème des serpents dans la maison et se met à se mutiler la peau en faisant un Ram-Dam de tous les diables. Il convient néanmoins de saluer la prestation de Jill Larson dans le rôle de la possédé, qui paye autant de sa personne que de son physique atypique pour livrer une interprétation aussi inquiétante qu’horrifiante dans ses excès hystériques. C’est bien l’actrice qui porte le film du bout de ses petits bras rachitique jusqu’à se mettre complètement à nue devant la caméra. Et pour ce qui est de la gérontophobie, le plus choquant restera surtout ces photos de vieux détournées que l’on voit agoniser dans un dernier rictus. Reste un film assez divertissant qui nous épargne de son drame larmoyant ou d’une banale tentative d’exorcisme. Mais hormis ce plan où l’on voit grand-mère tentait d’avaler goulument le crâne d’une gamine de 6 ans dans une vieille mine abandonné, on aura tout oublié d’ici peu de temps et c’est bien le principal problème de cet épiphénomène qui n’aura pas mis longtemps à s’effacer de la mémoire des gens.

Le-Roy-du-Bis
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le 12 déc. 2023

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Le Roy du Bis

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