Un bon western clairement pas à la hauteur de sa réputation



  • Que se passe-t-il ?

  • Demandez à votre fils!

  • Répondez.

  • Allez aux marais salants. Vous y trouverez 12 mules tuées, 3 chariots brulés. Cela m'appartenait.

  • Qui vous a dit de venir ici ?

  • Personne. Seulement j'y suis et j'y reste. Il faudra qu'on se fasse à cette idée.

  • Qui êtes-vous ?

  • Un illustre inconnu.



De l'union du réalisateur Anthony Mann et du comédien James Stewart sont sorties de grands films, comprenant dans le lot de multiples genres dont des westerns comme L'Homme de la plaine. Cette oeuvre marquera la fin d'une longue collaboration après Winchester 73, Je Suis un aventurier, L'Appât et Les Affameurs, entre Anthony Mann et James Stewart. Considéré par beaucoup comme un chef-d'oeuvre, je trouve ce titre galvaudé pour ce western certes pourvu de qualités visuelles et techniques formidables, mais qui perd de sa superbe à travers un récit brouillon, lambda et incomplet.


L'intrigue tourne autour d'un homme obsédé par l'idée de découvrir qui a tué son frère afin de le venger. Une histoire de vengeance sous forme d'enquête qui commence très bien pour finalement se perdre dans un autre récit prenant toute la place et délaissant ainsi au second plan l'intrigue principale. Une nouvelle intrigue présentant une confrontation qui n'est pas sans rappeler Le Souffle de la violence de Rudolph Maté sortie un an plus tôt, mettant en avant un Glenn Ford face à un ranch usant de méthodes radicales pour conserver ses terres. Il met en place un vieux propriétaire handicapé au caractère bien trempé n'ayant pas un mauvais fonds, qui sera trahi par deux personnes de sa famille : une de son sang, l'autre par lien. Ils s'allieront contre son autorité et Glenn devra composer avec tout cela, sachant qu'il sauvera le propriétaire.
Cela ne vous rappelle rien ?
C'est exactement la même chose pour L'homme de la plaine, à ceci près qu'il y a également en arrière-plan une histoire de vengeance sous forme d'enquête. Cela donne finalement l'impression d'avoir un script copié, bien qu'à mon avis cela soit involontaire (en tout cas c'est troublant), rendant le tout finalement lambda et de déjà-vu.


Certains éléments sont fâcheux. Qui peut me dire ce qui est arrivé à Chris Boldt (Jack Elam), qui tente durant le film de tuer au couteau Will Lockhart (James Stewart) qui le mettra en fuite en remportant son combat. Finalement Chris Boldt sera retrouvé assassiné. Qui ? Quoi ? Comment ?Pourquoi ? Par qui ? Aucune réponse ne sera donnée ce qui est bizarre. Comme s'il manquait un bout du film. L'histoire avance vite ce qui fait qu'on évite d'y repenser, mais cela ne m'a pas échappé.


Visuellement et techniquement L'Homme de la plaine est impressionnant, si je ne m'en tenais qu'à ces deux points je donnerais un 10 sans problème. La cinématographie ainsi que les images en cinémascope sont spectaculaires. Tourné au Nouveau-Mexique et en Arizona, Anthony Mann capture la magnificence de l'Occident à travers un cadrage habile avec des plans d'une richesse éblouissante. On est littéralement plongé dans l'Ouest à travers des plans toujours profonds et époustouflants. Une densité dans la mise en scène remarquable qui introduit magnifiquement dans les décors son histoire et ses personnages. Petit bémol autour de la composition décevante de George Duning qui nous avaient habitués à mieux autour des autres compositions de westerns.


Le travail de caméra autour du combat au corps-à-corps entre James Stewart et Arthur Kennedy se déroulant en partie dans un corral rempli de bétails est surprenant. Le plan mis en place juste avant la confrontation, où on voit un James Stewart en rage s'approcher de la caméra de face qui finalement finit par reculer à mesure que le comédien avance à travers un plan-séquence est tout bonnement géniale. Le film est étonnamment violent et sadique sans jamais filmer le tout en premier plan. Anthony Mann traduit la brutalité d'un acte à travers les visages défigurés de douleur. C'est efficace, comme durant la séquence de la balle tirée à bout portant dans une main.


Les personnages sont intéressants. James Stewart dans le rôle de Will Lockhart fait un super travail d'interprétation, c'est l'écriture autour de celui-ci qui me pose quelques petits problèmes, comme le fait qu'il ne questionne que très très peu autour de son enquête ce qui fait qu'on arrive même à ne plus y penser, si bien que lorsqu'il se retrouve enfin devant le coupable et qu'il l'accuse du meurtre de son frère on se dit : <<"Ah oui c'est vrai il menait initialement une quête de vengeance">>.
Donald Crisp est intéressant sous les traits d'Alec Waggoman, personnage intéressant bien que déjà vu et en mieux dans Le Souffle de la violence via le comédien Edward G. Robinson dans le rôle de Lew Wilkison. La comédienne Cathy O'Donnell, ainsi que le comédien Alex Nicol sont totalement oubliables. Reste l'acteur Arthur Kennedy (que j'ai adoré dans le western "Le Bandit") qui en tant que Vic Hansbro fait un excellent travail. C'est un personnage bien écrit, complexe et nuancé à la fois amenant tout du long une véritable présence.


CONCLUSION :


L'homme de la plaine bien qu'étant un western possédant de vraies qualités, s'entiche de défauts un peu grossiers autour d'un scénario brouillon et bâclé bien que dramatiquement fort, qui heureusement s'en trouvera compensé par la réalisation éblouissante d'Anthony Mann qui marque ici sa dernière collaboration avec le comédien James Stewart. Un souffle épique dans les décors et le visuel malheureusement desservi par son écriture, faisant de cette oeuvre une semi-déception pour moi.


Un bon western clairement pas à la hauteur de sa réputation.

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le 1 nov. 2020

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