Regarder l'Ibis Rouge, c'est un peu assister à une pièce de Feydeau avec des portes qui claquent. Il y a un couple, pas d'amants mais des personnages singuliers aussi escrocs les uns que les autres. C'est ce qui a du plaire à Jean-Pierre Mocky qui retrouve sa bande de copains de tournage à savoir les deux Michel, Serrault et Simon. Ces deux là, jouent respectivement un étrangleur et un pilier de restaurant grec surnommé Zizi qui se fait passer pour ce meurtrier par intérêt ou se faire remarquer. Deux compositions à la fois pathétiques et drôles qui résument bien l'esprit du film: une farce pas si tragique.
Un des personnages clés de l'intrigue est celui du représentant de commerce poursuivie par la pègre locale pour des dettes. Incarné par Michel Galabru, cet homme révèle toute sa noirceur vers la fin du film et son devenir pourrait presque faire sourire. De drôles d'oiseaux dont les pirouettes et les postures les mènent dans des situations pas possibles. Actions, dialogues et rythme sont au diapason pour un spectacle azimuté et singulier. Et déjà, beaucoup d'immoralité, qui deviendra la marque de fabrique de Jean Pierre Mocky. Il faut voir l'Ibis Rouge pour comprendre comment le réalisateur et son cinéma étaient des troubles fêtes au milieu des Gabin, Delon ou Belmondo, stars de la décennie de sa sortie. Bien construit, réjouissant et absolument irrévérencieux. Précurseur d'un style dont personne ne pourrait se passer aujourd'hui.