Faites vos jeux ! Lorsque c’est la première fois que Jean joue au jeu dans un casino, il est hésitant, ne sait pas vraiment quoi faire, mais rapidement la chance arrive et il se met à gagner assez pour tenir tête à son père et partir en vacances. Et nous pouvons faire un rapprochement avec ce film, hésitant avec des acteurs très indifférents mais avec la chance de notre côté car la présence de Jackie, jouée par Jeanne Moreau, donne de l’élégance au film. La musique très entrainante, avec un piano qui se déchaine, accompagne, ouvre et ferme le film mais accompagne également les personnages à chaque fois que la chance leur sourit. Et c’est une technique de montage qui correspond à l’esthétique du film, qui montre à la fois que Jean et son ami, puis Jean et Jackie enchainent les parties et en nous laissant supposer qu’ils gagnent à chaque fois, et cette musique est multiple dans les sentiments : en fonction de sa place dans le film elle évoque la joie de la réussite, mais lors de l’ouverture et de la fin du film elle contient en elle une pointe de mélancolie. Rien ne va plus ! Dans tous les sens du terme. On arrête les jeux comme on arrête de gagner, car Jean et Jackie viennent de perdre tout l’argent qu’ils n’avaient pas dépensé jusqu’à maintenant. Mais qu’elle est agaçante cette Jackie ! Cette femme qui ne sait pas ce qu’elle veut, qui se dit indépendante mais qui est sans cesse en manque d’argent à force de tout dépenser, qui est capable de mettre en jeu ses bijoux comme son billet de train, quitte à dormir dans la rue ; mais elle est capable de s’acheter des robes, de louer une chambre d’hôtel luxurieuse tout en médisant la notion d’argent et en répétant sans cesse qu’elle arrêtera de jouer la prochaine fois. Et Jean, gentil et discret, la suit partout, se laisse entrainer car le cœur l’emporte sur la raison. Le manque d’expressivité dans son jeu d’acteur correspond avec le personnage qu’il incarne, Au début du film cette atonie peut nous empêcher de se laisser emporter par le film mais il ne nous faut pas longtemps pour nous attacher au personnage, se surprendre à éprendre pour ce Jean complètement passif, gentil et raisonnable. Mais il est comme tous ceux qui jouent finalement : il dit qu’il va s’arrêter mais continue de jouer et perd comme gagne des grosses sommes d’argent. C’est tout noir ou tout blanc (ou devrions-nous dire rouge ?) et cette instabilité financière donne également de l’instabilité dans le film : durant toute sa durée nous ne savons pas s’ils vont en ressortir riche ou pauvre, et aucun indice ne nous est donné. 33 noir impaire et passe , à cheval ! La petite bille blanche est allée se loger dans la case 33 : c’est la défaite. Même la montre a été mise en jeu, Jackie n’a donc plus rien à l’opposé de Jean qui a assez d’argent pour retourner à Paris. Mais nous sentons que le film approche de la fin, et jusqu’au bout Jackie passe entre les doigts pour filer au casino. Mais son amant ne lâche pas l’affaire et insiste pour qu’elle vienne avec lui. Insensible qu’elle parait, refuse son offre mais dans un dernier élan un peu ‘cul-cul’, elle court rejoindre monsieur, qui sort du casino, en criant JEAN !
Musique