La Belle et la Bête
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La Belle et la Bête

Long-métrage d'animation de Gary Trousdale et Kirk Wise (1991)

Adaptation du conte éponyme de **Jeanne-Marie Leprince de Beaumont**, *Beauty & The Beast* est, dans la tradition des grands classiques des **Studios Disney**, un dessin-animé relativement manichéen mettant en scène, et en chansons, le matériau original pour le plaisir innocent des enfants autant qu'avec l'idée de leur donner là un semblant d'éducation morale. La structure y suit grossièrement celle du conte et, comme à l'habitude, c'est l'alternance d'errances, de terreurs et d'espoirs qui fait la puissance évocatrice du film et l'émotion de nos bambins. Mais contrairement au conte français, qui suit le regard et le parcours de la Belle, la réussite de cette adaptation faussement candide tient dans le chemin de la Bête, de cet être dur, colérique et renfermé, qui peu à peu va retrouver 


la douceur et l'humilité de son humanité perdue.



L'introduction narrée à travers une succession de vitraux est séduisante, colorée, et contraste avec ce qui nous est raconté autour de ce prince sans cœur maudit par une fée dissimulée sous l'apparence d'une sorcière : d'entrée le propos est clairement énoncé et le spectateur sait qu'il s'agira ici d'ausculter la sécheresse des cœurs et d'aller 


regarder derrière l'apparence pour découvrir la beauté de l'âme cachée sous la laideur des traits.



Bien vite alors le film vient danser autour de la Belle en flânerie dans les rues du village pour nous dire sa différence : là où toutes les jeunes filles se pâment à la vue du bellâtre Gaston, la Belle n'a d'yeux que pour les romans qui garnissent les étagères du libraire et ne rêve que d'aventures, de magie et d'émerveillements, d'échappées littéraires et imaginaires. Et incarne alors la femme émancipée à une époque où l'éducation des jeunes filles était loin d'être une priorité – rejoignant ici avec fidélité le portrait qu'en fait le conte original.


L'animation est superbe. Fluide et gracieuse sur des personnages taillés avec finesse, décors colorés sans dérision, on retrouve là un naturalisme proche des premiers longs-métrages de **Walt Disney** et c'est, pour le coup, 


un réel enchantement



que de se laisser emporter dans cette danse joyeuse, aussi insouciante que consciente et affirmée avec confiance. La première apparition de la Bête, effroyable et sublime, tient de la même veine des premières œuvres du maître : noirceur et terreur saisissante, corps imposant et voix grave, glaçante, le choc émotionnel est intense, vif, puissant. Garant là d'un équilibre idéal entre l'ombre sourde au cœur du monstre et la lumière rayonnante de la bonté de cette jeune fille clairvoyante et dévouée.


Il y a aussi dans ce métrage un certain respect de l'œuvre originelle qui fait plaisir à voir pour le public français – un poil chauvin – que nous sommes. Le respect de la langue aux enseignes des échoppes au début du film d'abord, mais aussi le personnage de Lumière, ce chandelier majordome qui, le temps d'une chanson à la française, prend de sérieux airs et de plaisantes allures de **Maurice Chevalier** pour développer un certain goût du savoir-vivre hexagonal. Sans compter l'incroyable ressemblance (est-ce là que **Christophe Gans** a vu l'évidence de son futur casting?) de la Bête et du regard profond, accrocheur, de **Vincent Cassel**.


Il y a quelque chose dans son regard d'un peu fragile, un peu léger,
comme un espoir.



Malheureusement, il y a également quelques ratés graphiques qui sautent à l'œil aujourd'hui : là où tout le monde semble s'entendre sur la beauté grandiose de la scène de danse intime dans la grande salle de bal, je suis atrocement dérangé par 


le contraste désagréable entre les personnages animés de celluloïd et ce décor en images de synthèse.



Si celui-ci est absolument lisse et palpable, il n'en demeure pas moins très éloigné en texture des personnages qu'il accueille et l'effet vient alors gâcher l'immersion narrative. Tout comme le sympathique clin d'œil à Fantasia dans ce même décor. À trop vouloir en faire... dommage.


*Beauty & The Beast* développe avec justesse le changement salvateur de caractère de la Bête et joue avec modernité de cette princesse forte et indépendante, se plaçant là en essai précurseur dans le catalogue des **studios Disney**, et délivre un message simple mais essentiel en invitant nos chères petites têtes brunes (oui, mes gamins ont d'épais cheveux sombres) à regarder


le cœur dans les yeux de l'autre, le faste à l'âme au-delà du corps.



Bienveillance établie malgré les terreurs, ce dessin-animé chéri du public mérite en grande partie l'estime du public et offre du pur divertissement dans la lignée des classiques de la firme sans trahir le conte qu'il porte à l'écran et, s'il n'est pas sa meilleure adaptation, vaut le détour d'un moment familial.

Créée

le 5 mars 2018

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