Certains cinéastes affirment que pour bien analyser un film, il faut analyser notre réaction au visionnage de ce film.

Je me suis alors demander comment ce film dont je n'ai jamais entendu le moindre mot et qui semble si peu reconnu a put d'une manière si joviale me prendre dans ses bras, étraignant d'une force herculéenne mon attention et mon plaisir de spectateur.


C'est mon premier de Jean-Pierre Mocky (que je ne connaissais pas), je ne m'attendais donc à rien, j'etais simplement prêt à accueillir une bonne œuvre des années 60.

Cependant, j'ai été absorbé du début à la fin tel un délice mielleux qui vous embrasse les papilles, pour vous dire que le bonheur est là, que vous le vivez.


On retrouve dans ce long métrage un casting remarquable avec les célèbres Francis Blanche, Jean Poiret et Bourvil. La relation particulière entre le réalisateur et Bourvil est d'ailleurs d'un bénéfice immense, car c'est sûrement ici que l'on admire l'acteur dans son jeu le plus authentique et franc. On aperçois tout ce qu'était André Raimbourg : une force naturelle qui sors de l'ordinaire (cette scène où il porte Mickey le bénédictin comme un cagot de fruits), un heureux naïf, un désinvolte attentionné, un homme satisfait de son entourage restreint :

"_Vous êtes seul ?

_(Le personnage de Bourvil) Seul et unique."


Le choix du noir et blanc rend le spectacle grandiose dans sa manière de s'approprier les points de vus et le contraste de lumière, avec des scènes mémorables dans un décor mi-lighthouse mi-Septième sceau. La direction photographique dans ce film est d'une millimétrie impressionante, reflétant de l'oppression de la corruption de la ville de Barges sur l'honnêteté préjudiciable de l'inspecteur Triquet ("C'est salissant mais c'est amusant")

Les personnages possèdent chacuns un toc particulier (Triquet : "Woup Woup" et son jeu de jambe, Virgus : "Hep Hep", le maire : "...quoi"), produit du rire mais aussi d'une différenciation appuyant sur finalement l'unique lien qui les relient tous, l'enquête de meurtres, la relation non conventionnelle qu'ils ont avec la mort.

Raymond Queneau applique sa plume pour offrir des dialogues loufoques et indiciblement réfléchis, où l'on retrouve entre autre cette réplique culte entre Bourvil et le gendarme :

_"Vous ne trouvez pas que ce conducteur est un véritable danger public ?"

_" Non, il conduit de travers mais c'est à vous de marcher droit."

Dans le si beau village de Barges que visite le crédule Inspecteur Triquet, ce sont là jalousie, la corruption, le meurtre, le voyeurisme et la fausse monnaie qui règnent. Le voyeursime s'avère être le vice par excellence des habitants, qui scrutent chaques instants et actions qui se passent dans la rue. Comme frappés par une crise d'odonymie, les artères de la ville deviennent le théâtre de la vie quotidienne pour les pervers en quête de n'importe quels ragots à raconter.

En guise de synthèse, j'affirmerai que la beauté de l'œuvre réside dans ses répliques, sa photographie et la performance des acteurs illustrant de façon plus qu'honorifique le livre de Jean Ray.


Mon objectif n'est pas tant de dresser un compte rendu du film pour partager mon ressenti mais surtout d'user de ma notoriété, aussi infime quelle soit, pour rendre une visibilité inexistante et pourtant méritée à un film débordant de précision. La cité de l'indicible peur (de son premier nom La grande frousse) associe la comédie et le fantastique en trouvant ses fondations sur la prestation d'un Bourvil vrai, qui y prête l'une de ses meilleure performance et place le film au rang de classique du genre.

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le 26 avr. 2023

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PabloEscrobar

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