Dans l’ombre de la grange, Vieux Major, le vieux cochon visionnaire, se tient sur son lit de paille. Sa silhouette fatiguée mais majestueuse se découpe dans un rai de lumière qui traverse les planches disjointes et sa voix, amplifiée par un léger écho, emplit l’espace comme une proclamation sacrée. La caméra balaye lentement les visages des animaux attentifs : les yeux brillants des chevaux, la stupeur des moutons, le regard inquiet de la chèvre. Ce plan inaugural ne se contente pas de représenter une promesse d’égalité, il érige la scène même du pouvoir : un moment où la parole devient loi, où la fiction de l’égalité se cristallise dans l’image. On croit assister à la naissance d’un monde nouveau : Vieux Major promet l’abolition de la servitude, la fin des chaînes humaines, une communauté où le travail et ses fruits seront partagés sans maître. Les lourds décors peints et les ombres épaisses chargent déjà l’utopie d’un pressentiment de trahison. La promesse d’une révolution pure s’inscrit dans un clair-obscur qui annonce son retournement. En France, l’élection d’Emmanuel Macron en 2017 a reproduit cette dramaturgie : le triomphe d’un prétendu renouveau, lui se posant en rempart contre l’extrême droite de Marine Le Pen et promettant un rassemblement de la droite républicaine et de la gauche humaniste, au nom d’un centre supposément fédérateur s’est immédiatement accompagné d’un usage maximaliste de la Constitution et d’un pouvoir qui s’exerce jusqu’à ses marges, déplaçant l’esprit démocratique dans les recoins sombres de la légalité.
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