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Tes amours naviguent sur des bateaux fous, dont les ancres se balancent Mer sait où

Je pense qu'il y a un fait dont nous devons prendre compte lorsque l'on parle de Jean Eustache réalisateur : il ignorait, jusqu'au bout, si l'art cinématographique était son meilleur moyen de communication. Il s’interrogeait notamment si la littérature lui conviendrait mieux. Ce fait explique tout, pour moi. J'aurais probablement mis une note nettement supérieure si "La Maman et la Putain" était une pièce de théâtre ou une nouvelle. Mais c'est un film ; qui dit film dit image animée. J'ai lu, dans une des critiques présentes sur ce site, que c'était un film davantage audio que cinématographique. Je suis d'accord avec ça, et pour cause, j'ai testé et approuvé ; j'ai pu m'occuper de mon frigo vite fait et suivre l'action, juste en montant le son. Pourquoi ce gugusse était parti s'occuper de son frigo, vous demanderez-vous ? Justement parce que j'ai trouvé ce film anti-cinématographique : les décors se répètent, vraiment peu de mouvements, une histoire sans conclusion. Après tout, pourquoi pas, si c'est un parti pris... Mais sur 3 h 40, le parti pris se délite lentement mais sûrement. Aussi magnifiques les dialogues soient-ils, aussi anthologiques soient les monologues, abuser d'une même recette pour chaque séquence sur une duré aussi longue a été vraiment problématique pour moi. C'est dommage. Parce que, en désactivant son instinct anti-Parigot, le jeu des acteurs et les dialogues se marient à un point que le film est capable d'offrir des séquences mémorables. La mise en scène est minimaliste, bien sûr, mais c'est cohérent avec ses partis-pris, qui sont on ne peut plus intellectualistes et post-Nouvelle Vague. Quant au regard sur la génération de Mai 68, je suis pratiquement sûr que s'il en parle, c'est comme contexte de la façon de parler de sexe. "La Maman et la Putain" n'empreint à aucun moment un sentiment de désillusion, c'est d'ailleurs un autre reproche que je peux faire au film: le manque d'évolution des personnages. Il n'est pas non plus particulièrement représentatif de son époque (ce qui lui fut d'ailleurs reproché à... l'époque), puisque la démarche artistique st très resserrée sur ses personnages plutôt que sur les événements, assez bouillonnants, du début des années 70. Ce ressentiment doit davantage à leur façon de s'exprimer sur le sexe je pense, parce que l'on ressent dans le jeu des comédiens que leurs actes est vus comme insolents et très associés à la jeunesse intellectuelle.
Je pense que c'est un film qui mérite qu'on tente sa chance avec lui, parce que si on accroche, putain ce que ça doit être génial. Mais pour ma part, "La Maman et la Putain" se lit, ne se voit pas. Tous les problèmes viennent de là.
Ah, et pour toute personne curieuse : Diaboligum a fait une superbe adaptation musicale du monologue final, à la sauce rock. Ça vaut le coup, c'est trop bien : https://www.youtube.com/watch?v=CpRhnqp_8rc&t=1s

Billy98

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