Du cocktail maison, de l'autobus et de l'arrogance médicale.

Six parce que le film m'a pas déplu, mais soyons clairs : il s'agit d'un pamphlet qui a rien grandiose. Il sert tout au plus à décourager les gens qui souhaiteraient aller mourir dans un hôpital roumain, peu importe lequel.

La mort de Dante Lazarescu est sans surprise aucune puisque le vieux meurt avant que le film commence. Lazarescu Dante Remus, c'est son nom, j'y peux rien, est un vieil alcoolique seul qui aime ses chats. Un jour, il décide d'appeler l'ambulance, mais parce que c'est samedi, évidemment, l'ambulance arrive pas. Et puis au téléphone, ce qu'il a semble banal. Suit sa détérioration au fur et à mesure qu'on le trimballe d'hôpital en hôpital parce qu'on peut pas le soigner ici, c'est plein à cause de l'autobus.

Les médecins engueulent les patients (et l'ambulancière), potinent, boivent du café, font des blagues, mais surtout, ils semblent prendre leur temps alors qu'ils ont devant eux un bonhomme dont l'état devient de plus en plus critique. Pas étonnant, alors, que notre vieux crève comme un con. Mais il est aussi alcoolique et un peu demeuré donc c'est sa faute aussi, soyons honnêtes. Les cocktails maisons ultra méchants, ça soûle, et quand on a un ulcère, on devrait se demander si on est pas en train de faire une connerie avant d'engloutir ledit l'ulcère et le mal de tête sous 300-400 millilitres de mixture.

Les acteurs sont convaincants, surtout Ion Fiscuteanu, qui rend admirablement un sexagénaire en fin de vie. Vraiment, il est parfait et les autres personnages sont également bien joués. Ils sont pas très riches, par contre, mais c'est plus un film de situation que de personnage. Sinon, l'ensemble est objectivement long pour ce qu'il tente de faire (153 minutes). Ça m'a pas dérangé, mais ils auraient pu raccourcir.

Le truc, c'est que alea jacta est. C'est dramatique, oui, mais on s'en fout, même si les acteurs sont bons. Le sort du vieux est déjà connu et par conséquent, on réagit pas. On assiste a son déclin en silence, sans émotion, sans vivre. On observe sans se sentir concerné le moins du monde. L'apathie est pas causée par le fait que l'histoire se déroule en Roumanie, mais plutôt parce que le film procède presque uniquement de la répétition. Toujours ambulance, admission à l'hôpital, examen sommaire, ambulance, hôpital, etc. Oui, d'accord, le système hospitalier est pourri, mais j'ai encore faim, moi. Ça suffit pas et puis le film défend une thèse avec laquelle je peux pas être d'accord parce que je connais rien de la Roumanie. Ma mauvaise foi a des limites (et j'ai plus 14 ans). Je peux bien accorder au film la photographie, qui est certes classique, mais qui colle par sa froideur et son degré de mélanine. Ça crée une pseudo ambiance. Enfin, Puiu aurait dû réaliser un documentaire, même si je doute que le résultat se soit montré moins vain.

Ah, et ça a rien à voir, mais je me demande qui est celui à qui je dois mes attentes comiques ("A black comedy with serious side effects" [mauvais jeu de mots], "The most acclaimed comedy of the year" [euh, non], etc.) Je comprends mal comment on peut rire de bon coeur, même si on rit jaune, devant ce film. Je comprends aussi mal comment on peut vendre Moartea domnului Lazarescu comme une comédie (la pochette du DVD suggère ça : une civière vide sur laquelle trônent deux chats et des vêtements, le tout sur un fond blanc et bleu poudre, ce qui renforce l'aspect léger (= image-affiche-blablabla) ; l'arrière de la boîte est aussi trompeur avec ses plans illuminés (beaucoup plus que dans le film) et presque comique. J'ai une bonne idée de ce qui peut y être drôle, mais bon, ça sent le marketing sale et malhonnête. Si c'est pas le cas, je me demande comment (ter) on peut autant rien comprendre à un film.
Megillah
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le 5 janv. 2011

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Megillah

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