"La Neuvième Configuration" est un film bien étrange, le genre d'expérience à laquelle on ne goûte pas tous les jours et dont l'on pourrait même se risquer à le saluer en tant qu'oeuvre singulière d'un réalisateur qui eut de gros soucis pour arriver au résultat final. Entre le montage charcuté et la tromperie sur marchandise de certains le vendant comme un film d'horreur (oui oui SensCritique vous en faites de même en le cataloguant comme tel), le chemin de croix, à l'instar du héros principal, fut de mise. Méconnu d'un bien grand nombre, il est pourtant dommage d'établir un pareil constat car ce long-métrage a beaucoup de choses à offrir.
L'histoire n'est finalement pas sans rappeler le grand classique "Shock Corridor" dont les accointances notamment sur la thématique de la psyché vacillant dans un climat anxiogène et de folie ambiante. Les lecteurs de bande dessinée pourront penser à l'excellent "La Pension du Docteur Eon". Un psychiatre est chargé d'une mission au beau milieu d'un château où se trouvent des anciens soldats de la guerre du Vietnam internés suite à de multiples troubles mentaux. Le but est d'identifier les simulateurs mais il finira par vite par se lier avec un ancien astronaute où des rapports de force ambigus créeront jusqu'à un maëlstrom de confusion mentale. Au sein de ce microcosme évoluent des portraits tout aussi particuliers les uns que les autres. Un homme en jet-pack, un autre se rêvant de peinture, un qui se croit être la réincarnation de Superman ou encore un pensionnaire se prenant pour un psychiatre. Les visages se confondent et on finit par ne plus trouver ses repères entre les résidents et les surveillants qui semblent ne pas avoir toutes leurs facultés mentales.
Indéniablement, la satire du bourbier vietnamien se fait sentir. Cette guerre sale, inutile menée par le pays le plus belliqueux et meurtrier qui soit et qui a entraîné de nombreux soldats dévoués sur le terrain des perturbations psychologiques. "La Neuvième Configuration" râtisse large et assez bien en confondant des styles antagonistes (comédie cynique, thriller philosophique, drame psychiatrique) jusqu'à atteindre une dimension mystique où l'on en arrive à la question centrale de prouver l'existence de Dieu. L'astronaute issu d'un domaine rationnel et pragmatique par essence tient à ce qu'on lui démontre que la dimension christique existe bel et bien et que la bonté suprême régit un monde dont il s'est isolé et qu'il n'a semble-t-il guère envie de côtoyer. Preuve en est que son seul séjour en dehors de l'asile débouchera sur un chaos en plein bar par des Hell's Angels imbibés.
"La Neuvième Configuration" n'est pas du tout un film facile d'accès et tenter de l'analyser pourra se révéler plus que casse-gueule mais il a en lui une force de frappe peu commune dont nous soulignerons une ambiance superbement bien travaillée et un duo d'acteurs plus qu'investis. Néanmoins, les effets du montage originel qui était d'une durée de 3h se font sentir et à plusieurs reprises, on pourra perdre ses repères. De plus, on accusera quelques scènes un peu mollassonnes qui casseront un rythme déjà bien posé. Mais qu'on se le dise, cette oeuvre atypique ne pourra que prêter à des débats ardents et les réactions épidermiques justifieront à elles seules un visionnage à condition d'être bien préparé. On aime ou on déteste.