Une bluette peut ramollir même les plus durs. Même Maurizio Merli. Imaginez celui qui ferait passer Harry Callahan pour une mauviette, qui frappe avant de parler, qui flingue dans le dos et qui provoque de larges sueurs à tous ses supérieurs, se faire amadouer par une jeune demoiselle à la vie dissolue. Et bing, la tuile ! Entre deux coups de tatane et un règlement de comptes au cimetière, le voilà qui s’attendrit, qui se promène avec sa belle au bord de la mer, le regard dans le vague, presque profond, et qui avoue qu’il est dangereux de l’aimer. Mince, on ne pensait pas que la moustache de notre viril blondinet à la chemise ouverte se mettrait davantage à frétiller pour les beaux yeux d’une midinette que pour un salopard en train d’agoniser face à son chargeur qui se vide.


Pourtant, le film s’ouvre comme un poliziottesco traditionnel. Des malfrats s’évadent d’une prison, ils ne sont pas contents d’avoir été donnés et dessoudent ceux à la langue trop pendue. Peur sur la ville donc et on doit rappeler aux affaires ce bourrin d’inspecteur Murri qui s’est jeté à corps perdu dans une nouvelle passion, la pêche. Il revient, flingue du malfrat et envoie sa doublure (pas très ressemblante même avec une perruque dégotée chez Michel) courser à moto de vilains garnements croisés dans la ville. Puis il rencontre la fille et la suite déraille. Maurizio Merli et la bluette, ça fait quand même plutôt deux. Surtout quand celle-ci est mal exploitée. Car la mauvaise utilisation de cette digression illustre combien Giuseppe Rosati passe à côté de son film. Les personnages sont totalement inconsistants et l’intrigue sans ressorts. Raymond Pellegrin n’a que trois scènes pour défendre son pedigree de criminel, ce à quoi, évidemment, on ne parvient à croire une seule seconde. James Mason est utilisé comme un vulgaire acteur de seconde zone. Et l’ami Maurizio Merli, traumatisé par la mort de son épouse et de sa fille, est bourrin parce qu’elles sont mortes.


Tout cela est bien entendu un peu léger dans la mesure où Giuseppe Rosati oublie ce qui fait la force du poliziottesco, à savoir l’action. La vengeance des malfrats évadés est résumée en deux minutes au début du film et leurs méfaits qui suivent n’ont rien de spectaculaire. Une poursuite à moto, quelques fusillades et une séance de bourre-pif dans un bus ne suffisent pas à imprimer le rythme. L’ensemble est mou, marqué par quelques envolées qui ne font pas forcément avancer le récit, et la romance ne cadre pas avec le ton attendu. L’ensemble se regarde mais tous les éléments rassemblés pour un en faire un film plus efficace sont très mal exploités. On reproche parfois au poliziottesco ses excès. Il pèche ici par son exact opposé. Dommage.


4,5

Play-It-Again-Seb
5

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le 12 déc. 2023

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PIAS

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