La Rue de la mort par Alligator
Film noir pas si noir que cela. Pourtant l'on se prend à le croire vu la tournure que prennent les évènements et ce, d'une manière assez rapide, et surtout plus encore quand on voit l'acharnement avec lequel le personnage joué par Granger entreprend d'enterrer son existence. Il n'en rate pas une, faisant connerie sur connerie. Bref un héros, un sombre héros de l'amer, un noir de noir, creusant sa tombe avec une fougue persistante autant que marquée par la frousse.
Peu de temps auparavant, on avait découvert déjà ce couple O'Donnell/Granger en facheuse posture (dans le film de Ray They live by night) et l'on craignait la fausse suite, le bis repetita de mauvais goût. Mais ici, si le dénouement délaisse les codes du noir, il n'en demeure pas moins que la réalisation d'Anthony Mann imprègne quant à elle une forte puissance de caractère noir à toute la pellicule. La chute des corps semble irrésistible.
Comme à son habitude, Mann utilise merveilleusement les cadres et surtout le paysage, ici urbain, New-York dans toute sa splendeur. La masse des buildings, les lignes droites des rues en plongée ou contre plongée encadrent les personnages, les enferrent dans un destin qu'on dirait inéluctable, enserrés qu'ils sont dans une prison de lignes droites, gigantesques barreaux aliénants.
Si l'on parvient à se résoudre au jeu caractéristique de lopette crétine que Granger s'ingénie à proposer à chaque rôle, on a là la possibilité de passer un bien agréable moment. Un petit polar magnifié par la mise en image maligne du sieur Mann.