Lors de ce 40e Cinemed dans le cadre du cycle “Comédie italienne”, ce “Larmes de joie” est sans doute le film qui m’a le plus surpris.


D’abord parce que j’avais du mal à m’imaginer la Magnani dans une comédie. Elle est magnifique, ça je le savais, mais surtout elle est drôle, flamboyante, pittoresque, …, grandiose en un mot. Et son association avec Toto et Ben Gazzara est très bonne. Ce petit trio met quelques temps à se former, mais quand il y parvient, il devient explosif.


Toto joue son personnage avec une belle maîtrise. Dans ce film en particulier (on peut le discerner facilement sur bien d’autres) il manie avec justesse quelque chose de très singulier et de rare, une capacité à mêler le rire et les pleurs, des émotions très proches, la quintessence de la comédie italienne. Il alimente à merveille cette noblesse d'âme des personnages emplis de joie, éclatant de force vitale pour mieux étouffer la souffrance d’être pauvre, pour sauvegarder le plus important, leur dignité. Voilà, Toto est magistral dès lors qu’il saute sans arrêt entre deux rives d’un même torrent de larmes. Il y a souvent chez lui cette espièglerie de l’enfance, mais également cette gravité, ce grand sérieux, ce réalisme qui lui colle désespérément à la peau. J’adore ce grand monsieur.


On sent que la présence de la Magnani à ses côtés a sans doute beaucoup influencé son jeu. Les deux personnages sont très touchants. Leur capacité, le respect de Umberto (Toto) pour Tortorella (Anna Magnani) est la pierre angulaire du récit pendant une grande partie du film.


En effet, le scénario joue sur le dilemme que subit Umberto, partagé entre son boulot de voleur avec Lello (Ben Gazzara) et son envie d’offrir dans le même temps une belle soirée de fin d’année à son amie Tortorella.


Dans la deuxième partie, quand le trio est formé, c’est un tout autre film qui débute, un peu plus grave encore. La relation entre Lello et Tortorella donne une tension romantique, que l’on comprend factice du côté de Lello au départ, encore qu’il y ait une certaine ambiguïté dans le comportement de Lello, et puis elle se développe et au final, c’est le personnage de Lello qui dispose alors d’une sorte de tribune pour dire toute la vérité de son indigence, de ce qu’elle l’oblige à être, au sens le plus plein, le plus ontologique et là encore la comédie italienne dépasse une nouvelle fois son comique pour placer son propos sur un terrain plus politique, en tout cas social. Dieu que le cinéma italien est bon quand il fait ça!


C’est un très beau film de Mario Monicelli avec un scénario riche, plein de surprises, comme souvent savaient le faire les scénaristes Suso Cecchi d’Amico, Agenore Incrocci, Furio Scarpelli et Mario Monicelli.
http://alligatographe.blogspot.com/2018/12/risate-di-gioia-monicelli-magnani-toto.html

Alligator
8
Écrit par

Créée

le 6 déc. 2018

Critique lue 371 fois

4 j'aime

Alligator

Écrit par

Critique lue 371 fois

4

D'autres avis sur Larmes de joie

Larmes de joie
Sabri_Collignon
8

Forza Italia!

Farce satirique sur L'Italie d'après-guerre,cette comédie est une digne représentante d'un genre qui à fait la gloire du cinéma transalpin des années 60.Dans la lignée des Vittorio De Sica,Luigi...

le 12 mai 2014

5 j'aime

3

Larmes de joie
Alligator
8

Critique de Larmes de joie par Alligator

Lors de ce 40e Cinemed dans le cadre du cycle “Comédie italienne”, ce “Larmes de joie” est sans doute le film qui m’a le plus surpris. D’abord parce que j’avais du mal à m’imaginer la Magnani dans...

le 6 déc. 2018

4 j'aime

Larmes de joie
johnfantebis
9

Je salue la fraternité des hommes, le monde des arts, et Anna Magnani.

Ainsi parle le cosmonaute qui est en moi. Tourné 3 mois après la "Dolce Vita", ce film-paquebot, à l'instar du Rex, bénéficie de l'aura de son "sister ship" de la même année. Au final nous nous...

le 25 déc. 2015

1 j'aime

Du même critique

The Handmaid's Tale : La Servante écarlate
Alligator
5

Critique de The Handmaid's Tale : La Servante écarlate par Alligator

Très excité par le sujet et intrigué par le succès aux Emmy Awards, j’avais hâte de découvrir cette série. Malheureusement, je suis très déçu par la mise en scène et par la scénarisation. Assez...

le 22 nov. 2017

54 j'aime

16

Holy Motors
Alligator
3

Critique de Holy Motors par Alligator

août 2012: "Holly motors fuck!", ai-je envie de dire en sortant de la salle. Curieux : quand j'en suis sorti j'ai trouvé la rue dans la pénombre, sans un seul lampadaire réconfortant, un peu comme...

le 20 avr. 2013

53 j'aime

16

Sharp Objects
Alligator
9

Critique de Sharp Objects par Alligator

En règle générale, les œuvres se nourrissant ou bâtissant toute leur démonstration sur le pathos, l’enlisement, la plainte gémissante des protagonistes me les brisent menues. Il faut un sacré talent...

le 4 sept. 2018

50 j'aime