Il y a des films qui vous tamponne le nerf optique et ripaille les tympans. Laurence Anyways en fait partie.
On suit les atermoiements de Laurence et Fred à contrôler une passion qui les détruit autant qu’elle leur donne vie, puis les anéantis, ensuite les ressuscitent et ainsi de suite. L’opposition entre les héro(ïne)s, alimente une vraie énergie romanesque, et cristallise nos (re)sentiments : L’indifférence légitime à l’égard de Laurence (brillamment interprété par Melvil Poulpeau, bluffant d’égocentrisme dans son genre) et l’empathie pour le courage de Fred (jouée par une Suzanne Clément d’une force incroyable), nous faisant continuellement expérimenter de nouvelles émotions.
Constitué comme une série de tableaux anachroniques, le film n’en finit pas de se sublimer. Certains morceaux qu’on pensait avoir trop entendu (Fade to Gray - Visage, The Chauffeur - Duran Duran), par la force des images qu'y superpose magistralement Dolan, prennent un sens nouveau. On se délecte des créations synesthésiques du chef d'orchestre… du pur génie!
Alors d’accord, parfois l’arôme eau de rose et quelques facéties formelles écœurent un peu, pour autant la virtuosité et le souffle de vie de l’oeuvre prend le dessus.
A la façon du marc de café, le film laisse une signature indélébile sur l’émail de notre imaginaire amoureux. Une impression étrange de déjà éprouvé mais jamais visionné, autant de réminiscences propre à chacun, mais étrangement universelles. La preuve d’un talent non-commun, chez Dolan, pour saisir et imager ce qui fait le sel d’une passion véritable.
Forcé donc, de souligner la maestria de Dolan, certainement son meilleur film avec Mommy, probablement le plus riche.