Quelques grammes de plomb dans un corps de brute
Aujourd'hui je suis venu vous parler du film Le Bon, la Brute et le Truand.
Étant données les déclarations d'amour déjà présentes dans d'autres critiques, il sera difficile de ne pas paraphraser.
Je vais donc volontairement rester succinct concernant la scène finale. Ça évitera au passage de trop spoiler.
C'est une apothéose visuelle, auditive et émotionnelle. L'une des meilleures jamais tournées, sans conteste possible.
C'est l'aboutissement de presque trois heures de film, qui viennent de se dérouler devant vos yeux émerveillés, sans jamais vous ennuyer.
La conclusion, la seule possible, d'une histoire mêlant cynisme, violence et réalisme.
Le petit Jésus en culotte de velours, quoi.
Et puisque j'ai commencé par la fin, c'est comment avant ?
BBT rassure, à plusieurs titres.
Il montre que l'on peut prendre le temps de raconter une histoire sans être chiant.
Il atteste que cela permet de s'attacher davantage aux personnages, de comprendre leurs réactions, voire commencer à les deviner.
D'appréhender un peu mieux les enjeux et motivations qui régissent l'univers dans lequel ils évoluent.
Bref, de s'immerger complètement dans le décor complexe que Leone tisse autour de ses trois héros.
Sur fond de guerre de sécession, il nous dépeint trois hommes à la philosophie bien trempée, en cela influencée par l'extrême rigueur de leur environnement.
Incarnés par trois acteurs aux gueules parfaitement invraisemblables et une foultitude de seconds rôles tout aussi détonnants, c'est la preuve d'un travail incroyable au niveau du casting, entièrement au service de la narration.
Véritables salopards, ces gugusses sont indéniablement les produits du monde qui les entoure, cruel, impitoyable, inhumain.
Et, paradoxalement, c'est cette parcelle d'humanité qu'ils véhiculent qui les rend fascinants.
Que ce soit entre eux ou, parfois, envers leur prochain, ils font montre du minimum de compassion possible mais sans s'en départir totalement.
Même si tout cela côtoie bien sûr la brutalité, la trahison, conditions nécessaires à la survie.
Un film qui mise donc beaucoup, sinon tout, sur les hommes qu'il montre.
Et ça aussi, c'est encourageant.
L'histoire, d'une simplicité affligeante si l'on s'y attarde un tant soit peu, n'est aucunement un handicap et prouve une fois encore, si cela était encore nécessaire, que le chemin importe davantage que la destination, inéluctable dans ce cas précis.
C'est bien le périple de nos trois zigotos, leurs destins qui s'entrecroisent, qui sera au coeur de nos préoccupations, largement autant que leur objectif, rendu commun par la force des choses.
Western, mais pour moi également road-movie, BBT me convainc également que même dans la perfection il existe des degrés.
Impossible de lui mettre autre chose que 10.
Je l'avais affublé d'un cruel 8 parce que je ne pouvais me permettre de coller la note maximale sur des souvenirs bien trop flous, mais les goûts sûrs de mes éclaireurs me faisaient aborder le film en toute confiance, qui n'a pas été déçue une seconde.
Néanmoins il est à mon sens légèrement en retrait de son petit frère, Il était une fois dans l'Ouest, qui sortira un an plus tard et achèvera d'établir le génie et le style de Leone. Et qui reste pour moi son chef d'oeuvre absolu.
Mais ceci est une autre histoire.