J'ai regardé ça pour voir l'évolution de la réalisatrice Marie-Castille Mention-Schaar qui est quand même passée de "Ma première fois" (avec Bowling entre temps que je n'ai pas vu) à les Héritiers, le premier était un navet fini plein de clichés et de banalités sur l'adolescence le tout sur un fond à l'eau de rose pestilentiel et le second était le film bienpensant sur la Shoah par excellence, mais où les cadres étaient soignés, où derrière il y avait un réel savoir faire, même dans l'écriture, ce qui laissait supposer qu'elle n'avait rien fait et qu'on lui avait fait réaliser l'outil de propagande ultime, plein de mauvaise foi, plein de bêtise mais qui paraît excellent aux yeux non avertis.


Et là le ciel attendra c'est un peu ça aussi. Le film se cache derrière Dounia Bouzar qui est consultante pour le film, qui joue son propre rôle... Qui est-elle ? c'est un peu Madame déradicalisation en France. Ici comme pour les héritiers on sent qu'il y avait du fric, que les gens avaient envie de faire ce film "nécessaire" un grand film poignant et qui tienne la route, loin du bordel que pouvait être ma première fois.


Sauf que bien évidemment ce n'est pas parce que c'est "bien fait" que tout à coup c'est bien ou respectable et le même constat que pour les héritiers s'impose ici, c'est non seulement mauvais, mais en plus c'est idiot, voire dangereux.


En gros je vois ça comme un film d'horreur pour parents où en fait à la place d'un démon on a son propre enfant qui est peut-être radicalisé mais on ne le sait pas.


Si je pense que le sujet de la radicalisation est intéressant, je pense aussi que l'aborder sous l'angle du documentaire, façon Depardon dans Urgences qui filme un long entretien aurait été bien plus pertinent. Là on a juste un amoncellement de clichés sur les ados, sur le complotisme, etc. C'est vraiment consternant. Rien que la structure du film où l'on suit trois histoire en parallèle, la première avec Sandrine Bonnaire (qu'est-ce-qu'elle vient foutre là ?) qui a sa fille qui est radicalisée, la deuxième avec Clotilde Courau dont la fille est partie faire le djihad et la troisième avec la fille de Courau au moment où elle se radicalise (je sais pas trop s'il y a une révélation de malade au moment où on apprend que Courau est la mère de la rouquine... faut dire que le film est sacrément chiant et c'est possible que je n'ai pas été attentif à ce genre de détails très pertinent comme la longueur des cheveux de Courau qui change à travers les époques pour bien montrer qu'une fois que notre enfant part faire le djihad on se coupe les cheveux et on devient moche (véridique !)).


Donc la structure du film est extrêmement écrite vu que l'on va voir d'un côté le désembrigadement et de l'autre l'embrigadement. Et c'est lourd...
D'un côté on a l'espoir et de l'autre le désespoir, c'est hautement symbolique, toussa toussa.


On n'a jamais un moment de vie, un moment qui serait juste gratuit, bien joué. Même lorsque la fille est avec ses copines, c'est pour nous montrer que sur son téléphone elle accepte déjà l'invitation sur fessebouc du grand vilain djihadiste. Lorsqu'elle mange de la merde au Macdo, c'est pour montrer que sur les billets de je ne sais pas quoi on voit les tours du World Trade Center en feu... et que sur les bouteilles de Fanta on voit le diable. Mais putain quoi... Bordel... Je ne suis pas expert en radicalisation, mais si ces gens se font embrigader pour un truc du style "on peut écrire Soleil sur sa calculatrice, coïncidence ? je ne le crois pas" c'est qu'ils ont déjà un pet au casque au départ. Je suis désolé, mais ce n'est pas sérieux.


Mais en même temps ça permet de cracher sur les vilains complotistes d'extrême droite, donc c'est tout bénef... et surtout ça évite de parler de ce qui est vrai dans les vidéos de propagandes djihadistes que l'on montre dans le film (je ne sais pas si c'est des vraies vidéos, etc), mais il aurait été intéressant de comprendre pourquoi ces gens se tournent vers l'islam qui leur semble être un rempart au nihilisme occidental et la perte des valeurs que l'Occident représente.


Mais ça impliquerait de se rendre compte que dans nos société actuelle, il y a quelque chose qui ne va pas et que le libéralisme libertaire laisse surtout les gens orphelins de valeurs ou de spiritualité. Mais c'est surtout l'occasion pour le film de parler du bon musulman et du mauvais musulman. Si tu respectes les règles à 100% tu es un mauvais musulman et si tu t'en fous un peu, ben ça va, tu es un bon musulman. C'est d'ailleurs l'occasion pour le film de montrer une scène entre une radicalisée et une "bonne musulmane", mais cette scène n'est jamais la vie, jamais elle sert à autre chose qu'à sa fonction première de dire "regardez comme elle est intégriste elle se lave les mains" et c'est ridicule.


Même si en pratique c'est un peu la position que défend Kant dans La religion dans les limites de la seule raison, c'est à dire que Dieu s'en fout un peu que tu fasses tout le folklore autour de la religion, ce qui compte, c'est que tu fasses le bien. Mais bon, dans le film on tombe tellement dans le manichéisme, ça c'est bien pour un musulman, ça c'est pas bien, que ça devient vraiment ridicule. Je pense qu'il y avait d'autres moyens de montrer l'intransigeance des radicalisés. M'enfin...


Le film n'arrive aucunement à tirer parti de ce qu'il met en place comme situations, à chaque fois le sujet réellement important est éludé. Je prends l'exemple de Courau qui va acheter des strings ficelle avec sa fille, ce que l'on voit c'est une fille que sa mère saoule parce qu'elle est adolescente. Pourquoi ne pas jouer là-dessus, montrer ces scènes d'incompréhension générationnelles, mais où en même temps il reste un peu d'affection (ou pas), faire en sorte qu'il se passe un truc dans la scène pour que les personnages aient au moins l'air d'exister 30s. Parce que moi ma fille me parle comme ça, m'ignore de la sorte elle ira au couvent ! Je veux dire que ce n'est pas normal que la mère ne réagisse pas étant donné l'insolence de sa fille et son mépris affiché.


Bon bref, tout ça pour vendre les méthodes de Dounia Bouzar super désembrigatrice, qui te fait passer le djihadisme pour une simple crise d'adolescence comme les mouvements gothiques, émo, punk, hippie, vegan ou féministes... Mais attention, ceux qui ne vont pas chez elle par contre sont perdus... et là après c'est un peu l'équivalent de l'oncle de 50 balais qui fait punk à chien, il est perdu.


Je ne veux pas déprécier le travail fait pour rendre les gens embrigadés inoffensifs à nouveau, mais comme c'est montré dans le film, avec l'émotion facile et tout, c'est juste consternant.


Bref un bon gros navet qui veut se présenter sous ses airs de film "essentiel", n'est finalement qu'un "enquête spécial" sur le djihadisme ou je ne sais quoi le dimanche soir sur M6, ça a beau être pas trop mal fait, il n'y a pas de cinéma et le propos est stupide.

Moizi
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le 4 oct. 2017

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Moizi

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