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Comédie culte, toujours fraîche malgré son âge !

Francis Veber signe ici une comédie qui claque comme un piège à ressorts. Chaque réplique, minutée au cordeau, déclenche une réaction en chaîne jusqu’à transformer une simple soirée entre “gens bien” en déflagration morale. Sous son apparente légèreté, le film prend un malin plaisir à retourner les rôles, à déshabiller les vaniteux et à éclairer d’un éclat presque tendre ceux qu’on croyait “petits”.


Veber orchestre cette mécanique avec une précision chirurgicale : un appartement bourgeois transformé en ring, un téléphone qui devient instrument de torture, et un personnage central, François Pignon, dont la naïveté agit comme une vérité radioactive. Jacques Villeret y déploie une performance d’une pureté rare, mélange d’innocence et de candeur qui fissure sans effort les armures sociales les plus arrogantes. Face à lui, Thierry Lhermitte incarne un Pignon-bashing de haut vol, avant de sombrer doucement dans le chaos qu’il a lui-même déclenché.


Ce qui fait la force du film, au-delà de son efficacité comique, c’est son contrechamp moral. Le rire n’est jamais gratuit : il dérange, pique, éclaire ce que la bonne conscience préfère garder dans l’ombre. On rit de Pignon, puis on rit avec lui, et finalement, on rit de ceux qui se pensaient supérieurs. Le Dîner de cons devient alors un miroir malicieux tendu à une société qui adore classer les gens, distribuer les étiquettes, et s’offrir le luxe d’humilier sans conséquence. Veber, lui, rappelle que la conséquence arrive toujours. Souvent par la porte que personne ne surveille.


Vingt-cinq ans plus tard, la pièce fonctionne encore avec une vivacité quasi théâtrale. Le rythme, la précision du montage, la musique d’intervalle presque imperceptible et la gestion millimétrée des quiproquos offrent une démonstration éclatante de ce que peut être une comédie française lorsqu’elle se discipline autant qu’elle s’enflamme.


C’est drôle, cruel, magnifiquement écrit. Et surtout, ça ne donne plus jamais envie d’aller dîner chez les imbéciles. Au cas où ils seraient du mauvais côté de la table.


Créée

il y a 5 jours

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Miss Chrysopée

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