Estampillé "comédie avec Pierre Richard" depuis sa sortie et ses multiples rediffusions, je ne peux m'empêcher, à force de revisionnages, de trouver au "Grand Blond avec une chaussure noire", un air de plus en plus sérieux. Car si l'on ôte les pitreries de Pierre Richard, et quelques gags par-ci par-là, le film aurait très bien pu se hisser dans le haut du panier des films d'espionnages français.
Ca démarre pas un duel entre deux cadres des services secrets. Impérialement interprétés par Jean Rochefort et Bernard Blier, qui s'affrontent en subtilité. Puis c'est une affaire d'espions, chargés de surveiller un pauvre type happé par une machination qui non seulement le dépasse, mais dont il n'a même pas conscience. Sauf que le pauvre type en question est un violoniste gaffeur incarné par Pierre Richard.
Les gaffes de Richard sont amusantes. Ainsi que le décalage avec les pratiques méticuleuses de surveillants qui s'inquiètent au moindre dérapage. Quand chaque mot, chaque action, peut avoir une signification très précise dans leur métier, ainsi un grand maladroit fait valdinguer leurs méthodes !
A côté, Yves Robert étonne avec de nombreuses scènes bien troussées. Duels de couloirs en regards, mais aussi un mexican standoff presque complètement sérieux. Quelques jeux de lumières (la scène du concert), une ambiance posée. La musique à coups de flûte de pan donnant une atmosphère étrange, entre le western et l'influence hors occident. Ou la fameuse robe portée par Mireille Darc, qui n'était pas prévue dans le scénario.
Avec en prime un fond tout à fait sérieux. Le scénario critiquant les services secrets. A la fois pour leur propension à mener des guerres internes, et pour leur irrespect total envers la vie privée (voire la vie tout court) des innocents.