Le mouvement général qu’épouse Hoosiers est celui, comme nombre de productions sportives, d’un déplacement depuis les côtés vers le centre, jusqu’au panier et la gloire associée. Le coach Norman Dale, inactif depuis une dizaine d’années pour des coups portés à l’un de ses joueurs, est intégré à un petit collège rural de soixante-quatre élèves dont l’équipe de basket anime une ville sinon désertée par ceux qui le peuvent. Le film brosse le portrait de la small town américaine, régie par une croyance aveugle en la Bible et en l’almanach : l’un des joueurs a besoin, avant d’entrer sur le terrain, de prier Dieu pour implorer sa clémence et solliciter son aide, ce qui donne lieu à un leitmotiv amusant (« J’ai ressenti Sa force », dit-il à son entraîneur qui lui répond aussitôt « mets un peu de Sa force dans tes dribles ! »). La photographie contribue d’ailleurs à cette atmosphère oppressante, qui oppose d’une part le brouillard d’un microcosme fermé aux étrangers – la séquence d’ouverture capte la voiture du coach lancée sur une unique route sans rien autour sinon des exploitations agricoles – et d’autre part la lumière artificielle des terrains de basket, lieux d’espoir voire de renaissance pour les sportifs et le public.

L’intérêt du long métrage consiste alors à recourir à un personnage extérieur, donc marginalisé, pour, par la force de son tempérament et de l’amour qu’il porte à l’équipe, rassembler les marginaux (l’élève Jimmy, bouleversé, vit à l’écart des autres, l’enseignante Myra Fleener, « fille de meunier », apparaît aigrie, contrainte de rester chez sa mère pour l’aide, l’ancien coach Shooter fait honte à son fils en raison de son alcoolisme et doit se retirer tel un ermite) et déporter toute cette marge vers le centre qui est celui de l’attention médiatique. Les qualifications successives des Hickorys rejouent la parabole biblique de David affrontant Goliath, explicitement convoquée lors de la finale qui se tient à Indianapolis, ville dont le collège compte deux mille huit cents élèves !

L’intelligence de Hoosiers réside dans son esprit d’équipe et dans son refus de toute glorification d’un tiers : les champions ne sont jamais filmés individuellement mais toujours lancés dans une action collective, en témoigne l’ellipse pertinente qui tait l’intégration de la légende vivante, Jimmy, et son entraînement. Les ralentis rendent visible la stratégie entre les joueurs, et la mise en scène veille à alterner plans sur le terrain et plan sur le banc des remplaçants et du coach, parties d’un même ensemble. Un divertissement réussi, porté par de très bons acteurs et une partition mémorable que signe Jerry Goldsmith.

Créée

le 13 juil. 2023

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