Je ne vais pas parler du sujet du film ni de son déroulement, d'autres l'ont fait, et de plus on peut lire le synopsis partout. Je vais plutôt exposer la manière dont je l'ai perçu et livrer mon ressenti.
L’œuvre est admirable, tant dans sa forme que par le fond, quelques longueurs à mon sens dans la première partie. Le mal n’existe pas. Pourtant tout au long du film il semble être présent sous diverses formes, tout proche, aisément identifiable. Il y a la soif de profit du grand patron qui veut implanter un « glamping » dans une zone où la nature et l’homme vivent en osmose, la non écoute et la non prise en compte de ceux qui peuplent ces lieux magiques, l’intrusion et l’appropriation par les citadins de ces terres qu’ils ne connaissent ni ne respectent, les balles meurtrières des chasseurs de cerfs…
Cependant opposer le businessman avide à l’homme qui n’a besoin de rien et la mégapole aux grands espaces sauvages, paraît trop simple. Si cette opposition existe bel et bien "le mal" ne se situe pas à cet endroit, ou pas seulement à cet endroit selon Hamaguchi.
La signification du titre va bien au-delà de ces évidences, l’ignorer serait passer à côté d’un sens plus profond qui se révèle dans les derniers moments du film. Le mal dont il est question est largement plus subtil, plus caché, et sans doute plus répandu aussi.
Dans les séquences finales le réalisateur nous donne la clef de l’étrange titre qu’il a choisi. Les éléments qui permettent de comprendre les derniers plans sont distillés au compte-gouttes tout au long du film par certains geste accomplis et certaines paroles prononcées. C’est en suivant très précisément le déroulement des derniers événements et la succession des plans que l’on comprend comment, de manière très fine, Hamaguchi met le doigt sur ce qui est parfois, voire souvent, à l’origine d’actes qui ont des conséquences dramatiques.
Il suffit de dérouler le fil et d’entrer dans la tête et la peau des personnages, Takumi le père, Hana la petite fille et Takahashi l’agent repenti, alors tout s’éclaire et devient limpide. À chacun son propre chemin de compréhension, mais à mes yeux il n’y a là ni mystère, ni énigme, le mal existe bien, même s'il porte ici un autre nom.
La fin du film est aussi dramatique que sublime par son impressionnante intelligence.