Deux contre un !

L'Américain moyen (pas si moyen parce que très talentueux ici dans son domaine professionnel !) qui face à une situation extraordinaire va être lui-même extraordinaire, un contre deux... Cet Américain moyen est un homme juste, qui se bat contre le reste du monde pour ce qui est juste, qui se ressource au besoin dans sa famille... Oui, en résumé, on est bien chez Spielberg, le protagoniste est plus que jamais un personnage spielbergien. Et quel acteur fétiche du réalisateur a de la manière la plus mémorable qui soit incarné ce type de personnage, Tom Hanks. Inévitable que sur un tel scénario, ces deux-là ne se rencontrent pas encore.

Cette nouvelle rencontre prend place dans une histoire, tellement incroyable que seule la réalité peut en créer une comme celle-là, sur fond d'espionnage et de Guerre froide où la température était vraiment vraiment très basse. Même si c'est le style Spielberg qui règne en maître, on peut reconnaître dans quelques traits d'humour le style des frères Coen, qui ont participé à l'écriture du scénario.

La reconstitution du début des années 1960 est sobre, classique, proprette (parfois un peu trop, visiblement la peinture à cette époque ne tachait ni les mains, ni les vêtements !). Thomas Newman ne parvient pas à être aussi inoubliable à la BO que John Williams, fait le job, sans plus.

Autrement, j'ai apprécié la critique que Spielberg fait des Etats-Unis à travers les abus de la CIA, une société engluée dans sa paranoïa (la scène dans la salle de classe fait bien passer des messages à elle toute seule !). Petite maladresse tout de même lorsque par le montage, on passe au prisonnier américain forcément mal traité par les méchants soviétiques au prisonnier soviétique forcément convenablement traité par les gentils Américains (dans la réalité, les Soviétiques en effet n'étaient nullement des tendres, mais les Américains ne valaient guère mieux !)  ; une petite pointe de manichéisme dans un film nettement plus subtil dans ses autres scènes, dommage.

Pour finir, deux autres points qui m'ont particulièrement plu dans ce film. Déjà, le premier, on ne voit absolument pas le temps passer, ensuite, Mark Rylance, en espion soviétique stoïque et pince-sans-rire, est excellent et vole même sans vergogne la vedette à Hanks à chaque fois qu'il apparaît.

Un film à l'ancienne (dans le bon sens du terme !), dans une époque un peu trop dominée par les blockbusters, certes imparfait, mais toujours prenant. Dommage qu'on n'en voie pas plus souvent aujourd'hui.