Le Privé
7.6
Le Privé

Film de Robert Altman (1973)

Voir le film

Philip Marlborowe renaît de ses cendres

Juin 1950. Imaginons que Philip Marlowe, personnage des romans de Raymond Chandler, s'endort ivre dans son appartement. Il se réveille 23 ans plus tard en tant que Philip Marlowe, cette fois personnage du film de Robert Altman. Si son corps n'a pas trop subi les outrages du temps, autant dire que son esprit est resté bloqué dans les années 50.


Voilà donc le traitement qu'à voulu employer Altman pour son film : scruter les 70's dans les yeux d'un type qui a 20 ans de "retard". Il devient alors délicieux de revisiter cette décennie, à travers un personnage nonchalant, solitaire, en perpétuel décalage.


Si la promesse d'une intrigue de film noir est ce qui m'a attiré en premier lieu, c'est finalement le traitement du personnage principal qui a retenu mon intérêt. On se régale de voir Elliott Gould (excellente prestation de sa part) parler seul, grommeler même, avoir pour préoccupation ultime le bien-être de son chat, et surtout envoyer des skeuds tout en finesse et ironie à tous ceux qu'il croise : flics, alliés & antagonistes, tout le monde repart avec une bonne baffe verbale dans la trogne.


Revenons-en à l'intrigue; celle-ci comporte tous les ingrédients qui font la saveur particulière des films noirs : protagoniste embarqué dans une histoire qui le dépasse, femme fatal, trahison & tromperies, cynisme, fatalisme... L'histoire, somme toute classique, se suit bien sans pour autant transcender son genre.


Je n'ai pas lu l'oeuvre original (le bouquin de Chandler donc), il parait cependant que l'amitié Marlowe/Lennox est plus creusée dans le livre. C'est l'un des points faibles que j'ai décelé dans le film : ce qui guide Marlowe dans le film (outre sa volonté de retrouver son chat), c'est la conviction profonde que Terry Lenox est innocent. Présenté comme ça l'est, c'est un peu surfait. Et cela fait grandement perdre de l'intensité à la scène finale,


où Marlowe découvre la vérité et abat Lennox de sang-froid. Il est également curieux de constater que le gros de l'intrigue se lance grâce à la complice de Lennox, ce qui permet à Marlowe de remonter au fur et à mesure sur la bonne piste. Ce point de départ sonne comme une incohérence à mon sens.


Au final, et malgré quelques lacunes dans l'écriture, on passe un bon moment devant Le Privé. La mise en scène d'Altman, l'originalité du protagoniste, les thèmes abordés (le romancier soûlard en panne d'inspiration notamment) et quelques scènes de bravoures (Marlowe pris en filature par un bleu ou Augustine qui retrouve son pognon) en font une franche réussite.


7,5/10

MrNice
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films des années 1970

Créée

le 2 sept. 2019

Critique lue 137 fois

1 j'aime

MrNice

Écrit par

Critique lue 137 fois

1

D'autres avis sur Le Privé

Le Privé
Docteur_Jivago
9

The Long Goodbye

Après Humphrey Bogart et avant Robert Mitchum, c'est au tour de Elliott Gould d'enfiler le costume du détective privé Philip Marlowe, personnage imaginé par l'écrivain Raymond Chandler à la fin des...

le 6 sept. 2014

40 j'aime

7

Le Privé
Gand-Alf
9

Marlboro Man.

Mon été cinématographique aura été placé cette année sous le signe de Turner Classical Movies. Face aux nouveautés fades proposées par les grandes chaînes payantes, TCM m'aura offert une belle...

le 2 sept. 2014

31 j'aime

Le Privé
Teklow13
9

Critique de Le Privé par Teklow13

Le film s’ouvre sur le réveil d’Eliott Gould ou Philip Marlowe le détective privé de Chandler. Il est réveillé par son chat. En fait tout le film d’Altman pourrait être condensé dans cette séquence...

le 10 oct. 2012

24 j'aime

Du même critique

Le Faucon maltais
MrNice
6

Premier jet d'encre noire

Le Faucon Maltais, c'est un peu le film des grandes premières : 1ère réalisation pour John Huston, 1er rôle principal (du côté du "bien" qui plus est) pour Humphrey Bogart et surtout, premier film...

le 25 sept. 2019

3 j'aime

2

Phantom of the Paradise
MrNice
6

Winslow or lose fast

Winslow est talentueux et naïf. Suffisamment pour se faire briser. En revisitant Le Fantôme de l'Opéra de Gaston Leroux ainsi que le mythe de Faust, De Palma en profite pour dresser une critique pas...

le 28 août 2019

2 j'aime

Le Privé
MrNice
7

Philip Marlborowe renaît de ses cendres

Juin 1950. Imaginons que Philip Marlowe, personnage des romans de Raymond Chandler, s'endort ivre dans son appartement. Il se réveille 23 ans plus tard en tant que Philip Marlowe, cette fois...

le 2 sept. 2019

1 j'aime