Le Solitaire
7.4
Le Solitaire

Film de Michael Mann (1981)

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Michael Mann et ses 30 secondes montre en main.

Michael Mann signe un véritable chef d’oeuvre ! Honnêtement, je ne m’attendais pas à être autant impressionné par ce film. Je vous rassure, Heat reste tout de même le meilleur de Michael Mann à mes yeux. Et ce n’est pas un hasard que je vais ranger Le Solitaire juste à côté. Non pas parce qu’ils sont tous les deux signés de Michael Mann, mais surtout parce qu’ils ont énormément de points communs. Limite, on pourrait y voir en Heat une suite ou un reboot. D’ailleurs, il aurait été génial (attention fantasme de cinéphile) que Neill McCauley fasse référence de Frank dans Heat, à travers la fameuse réplique « Si tu veux faire d’vieux os dans c’métier soit libre comme l’air, tout ce qui a pu prendre une place dans ta vie tu dois pouvoir t’en débarrasser en 30 secondes montre en main, dès que t’as repéré un seul flic dans le coin. » Cela aurait absolument parfait.


Bref, revenons plus sérieusement au Solitaire, qui aborde le cambriolage sous des angles totalement neufs pour l’époque, et cela ne prend aucune ride. Michael Mann nous emmène dans l’intime du cambrioleur, une humanisation du personnage, loin des stéréotypes. La ville de Chicago passe également au crible de manière percutante, et le personnage de Frank souhaite vivre en marge de celle-ci. Son passage en prison lui a fait adopter une philosophie de vie, qui va guider ses choix et son destin dans la jungle qu’est Chicago.


La mise en scène de Michael Mann est d’une beauté et d’une implacabilité renversante. Il impose avec force son regard et sa technique, et redonne ainsi une nouvelle dimension au film noir. Plus intime et réaliste, le cinéaste travaille au plus près les émotions de ses personnages. Une immersion instantanée dans le quotidien d’un homme qui tente de se reconstruire une vie, tout en volant des diamants. La ville de Chicago est également très importante pour Michael Mann, l’urbanisation est omniprésente dans son cadre. Il se montre méticuleux sur chaque plan (ombres/lumières, travelling, fixe…) et également sur le montage qui apporte une cadence optimale. Une virtuosité qui nous dévoile déjà un grand cinéaste, qui sait ce qu’il veut et qui fera tout pour que sa vision soit respectée.


Ce polar brille par sa forme, qui ne serait rien sans la justesse de l’écriture. La composition de Frank respire l’intelligence, et il est évidemment qu’il s’agit d’une des grandes réussites du long métrage. Michael Mann donne les clés à ce personnage pour conduire son histoire, et le spectateur. Un anti-héros très proche de Neill McCauley (Robert De Niro dans Heat), un homme qui est brillant dans le vol, mais beaucoup moins dans les relations humaines. Il est guidé par un idéal, qui s’oppose clairement à sa situation et son environnement. Une ambiguïté que Michael Mann articule tout au long du film, jusqu’à la dernière seconde. Je ne vais pas vous en dire plus, car j’ai peur de vous gâcher le plaisir de (re)découvrir ce film. En tout cas, vous serez ému par ce personnage qui a une volonté d’acier et une sensibilité profonde.


Venons-en à présent à la musique, qui participe activement à la réussite du long métrage. Pourtant, Tangerine Dream a été nominé à l’époque au Razzie Award de la pire bande originale. Comme quoi, cette cérémonie ne sera jamais réellement objective dans ses choix. La musique électronique agit comme un tourbillon d’émotions, reflétant le stress, l’adrénaline, la peur ou encore le plaisir. On note également la présence du rock pour la dernière scène, l’atmosphère est somptueuse (proche de Pink Floyd) tout comme le message qui en ressort. Bref, Tangerine Dream a fait de l’excellent travail. Son score est adéquation totale avec le style de Michael Mann.


Venons en au casting. Dans la peau de Frank, un as du cambriolage de coffre fort, on a un très grand James Caan. Son charisme, son aisance et son implication rendent son interprétation absolument magnifique. On n’a rarement vu l’acteur à ce niveau, sa composition fait corps avec le personnage. Chaque détail compte, et c’est là que l’on voit la rigueur de l’acteur et de Michael Mann.


Tuesday Weld incarne la sublime Jessie, qui est l’épaule parfaite pour Frank. Bien qu’elle ne parle très peu, la scène du l’américan diner suffit amplement pour que l’on cerne son personnage. Comme pour Il était une fois en Amérique, l’actrice dégage énormément à travers son regard, et Michael Mann l’a parfaitement compris.


En résumé, Le Solitaire est un très grand polar ! Dés son premier film pour le cinéma, Michael Mann montre déjà qu’il a tout d’un grand.

Jérémy_Poncelet
9

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Créée

le 19 févr. 2018

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