Le caractère symbolique qu’a pris le duel entre le vieil homme et le mastodonte marin a fait en sorte que le roman d’Ernest Hemingway s’est vu accorder une place importante dans la littérature mondiale. Il y a un peu du David contre Goliath dans cette histoire. Un homme vieilli sur un frêle esquif contre une bête monstrueuse dans son élément naturel. C’est l’homme devant la nature et l’adversité qu’il y rencontre. C’est aussi l’orgueil du mâle mis au défi. Le vieux, ancien champion de la tire au poignet, accepte mal d’être la risée du village. En remportant cette guerre d’usure et en ramenant au quai cette prise aussi décharnée soit elle, il aura aussi vaincu l’humiliation et pourra partir en paix lorsque son jour à lui viendra. John Sturges avait un défi d’un tout autre ordre : Rendre crédible à l’écran cette pêche miraculeuse aussi peu équipé que le vieil homme sur sa barque. Pour y arriver le réalisateur a utilisé à outrance les plans rapprochés tournés en studio devant une toile de fond, dont les séquences du marlin plongeant hors de l’eau. Cela afflige considérablement le film au niveau des raccords touchant la lumière et le climat. La fable invite le spectateur à une certaine naïveté, mais c’est plus difficile quand on décèle une volonté de camoufler un manque de moyen. Malgré une performance honnête de Spencer Tracy, l’image ne réussit pas amplifier la portée de la trame narrative. Pas surprenant qu’on ait voulu relever à nouveau le défi dix ans plus tard.