Le voyage d'Arlow
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le 26 déc. 2015
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On avait commencé à le voir dans les bandes-annonces, le nouveau Pixar est beau, très beau même. Continuant sur la lancée de ce qui avait pu être aperçu dans le court métrage Le Parapluie Bleu (qui précédait Monstres Academy en salles), le studio a choisi un style d’animation photoréaliste et c’en est saisissant. La nature est représentée avec une précision et une beauté encore jamais vue jusque là dans un film d’animation, au point où l’on se demande souvent si il ne s’agit pas de prises de vues réelles. Seuls les personnages échappent à ce traitement, probablement pour éviter l’uncanny valley, et aussi probablement pour permettre une meilleure transmission de l’émotion par les animations faciales.
Ce choix est heureux, car les personnages du film sont tous très attachants, le tout avec une économie de paroles et de descriptions extrêmement agréable. On arrive notamment parfaitement à ressentir les variations d’émotions de Spot, le petit garçon préhistorique, alors qu’il ne parle pas du tout (à part pour aboyer, grogner, hurler, bref, agir comme un loup). L’évolution d’Arlo, dont l’aventure s’inscrit ici dans une quête initiatique « classique », est très bien écrite: elle ne semble à aucun moment forcée et l’on ressent véritablement sa transformation.
Le Voyage d’Arlo a été présenté par certains comme un Roi Lion actualisé. Je ne suis pas d’accord avec cette définition: si l’on excepte des personnages de méchants apparaissant trois minutes à l’écran qui ressemblent en effet aux hyènes, le film tient plus de Frère des Ours -film inégal mais grandiose-, de par le duo de personnages et leur évolution. Dans le Roi Lion, Simba grandit intérieurement et prend ses responsabilités très rapidement à la fin du film, alors que là, comme dans Frères des Ours, les personnages sont dans un voyage qui va les rapprocher, leur faire changer de perspective sur le monde, bref, le film tout entier est consacré à justement voir les personnages principaux grandir.
Mais il y a un dessin animé qu’il me semble plus approprié de rapprocher du Voyage d’Arlo. Le réalisme naturel des décors, la simplicité du scénario, l’économie de dialogues, la construction narrative, l’émotion… tout dans ce film me fait penser à Bambi. On retrouve une simplicité presque enfantine dans ce film, construit lui aussi comme des morceaux de « tranches de vie » qui vont faire évoluer le personnage, qui rappellent le chef-d’œuvre de Walt Disney. D’aucuns -et moi le premier à la sortie de la salle- vont dire que du coup, le film s’adresse à un jeune public… C’est dur à dire. Est-ce que des choses simples s’adressent à des tout-petits ? Walt Disney n’a pas pensé Bambi (ni aucune de ses productions d’ailleurs, n’en déplaise à François Aubel) comme un film destiné aux enfants, mais comme un film simple et émouvant, avec un parti pris esthétique fort (qui lui a d’ailleurs valu d’être sélectionné par le National Film Preservation Board pour la conservation à la Bibliothèque du Congrès pour son « importance culturelle, historique ou esthétique »). Je vois aujourd’hui Bambi comme un chef-d’œuvre, une œuvre d’art au plus pur sens du terme, et je ne vois donc pas pourquoi il faudrait rejeter Arlo sur cette base. Point de sous-texte pour adultes ici, juste l’intemporalité d’une belle histoire bien construite. D’ailleurs, comme son illustre aîné, il provoque des réactions émotionnelles fortes chez les enfants, ce qui est assez rare chez Pixar. Cela faisait longtemps que je n’avais pas entendu des enfants pleurer de tristesse dans une salle de cinéma.
Un petit mot sur le court-métrage présenté avant, qui est Sanjay’s Super Team. Assez étonnement basé sur la relation entre le réalisateur et son père, au point que leur photo apparaît dans le générique de fin, il parle d’un conflit de génération, et du problème de la préservation de la culture locale dans un monde globalisé. Beaucoup de retours l’ont décrit comme anecdotique, mais je l’ai trouvé plutôt touchant, avec un joli rendu cel-shading durant sa majeure partie, qui sied bien l’histoire, et il est toujours agréable de voir d’autres cultures représentées dans ce genre de projet, ça ouvre des possibilités en terme d’animation et de design.
Je ne saurais que trop vous conseiller de faire fi de vos préjugés et d’aller voir Le Voyage d’Arlo. La prémisse « et si les dinosaures n’avaient pas disparus » est dispensable et pas spécialement bien utilisée, et la musique gentillement frontierlandesque de Mychael Danna n’atteint jamais les hauteurs oniriques de son travail sur l’Odyssée de Pi, mais le film constitue un tour de force technique remarquable et possède des personnages solides et surtout une très belle histoire intemporelle -qui vous fera verser votre larme à coup sûr- à la manière du Monde de Némo, et surtout des meilleurs classiques d’animation de chez Disney. Quand j’ai quitté la salle, je n’ai vu dans le film qu’un produit destiné aux plus jeunes. Aujourd’hui, je n’attends plus qu’une chose: le revoir au plus vite.
http://explorersclub.fr/2015/12/01/le-voyage-d-arlo-critique/
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Créée
le 1 déc. 2015
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