Les affameurs est un excellent western du cru Mann/Stewart, réunissant plein de talents, dont Nathan Juran à la direction artistique, à qui j'imagine on doit la qualité des décors, notamment dans les rues de Portland. C'est un western qui s'inscrit dans la mythologie, avec ses montagnes enneigées et son bateau à aubes, ses indiens et ses bandits, ses rudes colons et ses avides orpailleurs. Mais déjà le côté sombre de la légende contamine les images. L'appât du gain transforme les hommes, à l'image de Hendricks, si sympathique avant qu'il ne devienne un homme d'affaires sans scrupule. Les colons fuient toujours plus loin (l'Oregon ici), espérant à chaque fois recommencer une vie en harmonie avec la nature, loin de l'avidité des hommes. La simplicité de l'enjeu de la rédemption est un peu complexifié avec le personnage d'Arthur Kennedy, "bad guy" du film autant qu'allié fidèle, le pendant de James Stewart qui aurait lui aussi voulu sa chance mais qui ne saura pas la saisir.
Par contre, alors que je le vois pour la troisième fois, je trouve toujours que le personnage de Rock Hudson est très maladroitement amené, qu'il semble sortir de nulle part. Sans doute joue-t-il le personnage plus jeune admiratif des durs à cuire qu'il voudrait imiter, bien qu'il soit "too soft", lui lancera Arthur Kennedy. Mais on dirait qu'il est greffé maladroitement à l'intrigue, comme si on l'avait imposé au film sans que Mann ne sache quoi en faire!
Cela n'empêchera pas d'apprécier ce western, très réussi à bien d'autres égards.