Peu transportée par le deuxième volet de la saga des Animaux Fantastiques, je suis allée voir la suite en traînant les pieds, maugréant déjà sur les incohérences temporelles, le portrait très policé d’Albus Dumbledore et l’absence de Johnny Depp pour jouer Grindelwald.

Au sortir de la séance, me voilà prise d’une irrépressible envie d’imaginer ce à quoi auraient pu ressembler ces trois volets si quelqu’un avait bien voulu brancher son cerveau et mis de côté tous les désidératas des fans et des extrémistes de tout poils des réseaux sociaux. Non, sérieusement. Posez vous deux secondes dans ce fauteuil confortable, servez vous quelque chose à boire qui vous plaise et écoutez un peu (enfin, lisez).

Premier film : une histoire qui se suffit à elle-même, avec un début, un milieu et une fin dans le même écrin, et qui relate comment Norbert Dragonneau, sorcier déphasé et repoussé par ses semblables, réussit à devenir le plus éminent magicozoologiste du monde magique. Pas besoin d’intégrer Dumbledore et toute la clique des personnages rattachés à la saga du sorcier binoclard (hormis Poudlard puisque l’histoire commencerait nécessairement durant ses années d’études), mais une foultitude de bestioles encore jamais vues auparavant ; de l’humour, de la légèreté, de l’action et un peu de suspens. Le tout s’achevant sur une fin heureuse où Norbert oserait enfin avouer ses sentiments à Tina Goldstein. Bref, un film tout public, plutôt simpliste dans son scénario, mais qui redonnerait un savoureux coup de fouet à l’univers Harry Potter.

Ensuite, exit Les Animaux Fantastiques, on passe à un diptyque sur l’histoire de Dumbledore parce que, quand même, les fans aimeraient bien en savoir plus que les quelques miettes laissés dans les bouquins (et les nano-miettes perdues dans les films).

Premier film : l’histoire commence avec un Albus Dumbledore qui sort de Poudlard (ou qui suit sa dernière année) et qui, avec son ami Elphias Doge, prévoit de se faire un voyage autour du monde pour découvrir le monde magique ; et ce, malgré la pression qui pèse sur ses épaules puisque sa mère n’hésite pas à lui rappeler qu’il est l’aîné de la fratrie et que, en tant que tel, il a des devoirs (notamment celui de prolonger la lignée). Sauf que voilà, durant les vacances, le neveu de Bathilda Tourdesac, voisine des Dumbledore, fait son apparition et tout bascule pour le jeune Albus. Aveuglé par son amour pour Gellert Grindelwald – et aussi un peu guidé par la pensée familiale puriste –, Albus embrasse les idées du jeune homme et tourne peu à peu le dos à tout le monde, y compris son meilleur ami et sa famille. Dans le même temps, on verrait une histoire d’amour se nouer entre Abelforth et une Moldue afin d’introduire le personnage de Croyance (et d’appuyer sur le fait que, non, chez les Dumbledore, on n’épouse pas des « sans magie »). Bien sûr, le récit s’achèverait sur l’accident qui a emporté Ariana et Albus qui réaliserait brutalement son erreur (puisque Gellert hausserait anodinement les épaules à l’évocation du drame, prétextant qu’il est inutile de s’attarder sur une Cracmol).

Deuxième film : quelques années se seraient écoulées. Albus, éminent chercheur et puissant sorcier reconnu, serait devenu professeur à Poudlard pendant que Gellert commencerait à se faire un nom dans la sphère politique du monde magique. Voire, il aurait déjà regroupé beaucoup de fanatiques à ses côtés, inquiétant les autorités compétentes – ou presque – au passage. Toutes les tentatives de le débouter se révélant inefficaces et encourageant même plus de monde à le rejoindre, les ministères supplient le célèbre Albus Dumbledore d’intervenir. Sauf que celui-ci éprouvant toujours des sentiments envers Gellert, ne se sent pas de l’affronter, malgré tout le mal qu’il fait autour de lui. Tout bascule finalement lorsque son amour de jeunesse lance à ses trousses un Obscurus, qui n’est rien moins que son neveu manipulé par Gellert (car ni Albus ni Abelforth n’auraient connaissance de cet enfant). C’en est trop pour l’aîné des Dumbledore qui décide alors d’affronter le mage dans un duel mémorable dont on connaît tous le dénouement.

Voilà. Est-ce que là, ça n’aurait déjà pas un peu plus de gueule que cette trilogie boiteuse qu’on nous a servie ?

Parce que, clairement, le souci de cette « saga », c’est qu’on a voulu parler de beaucoup de choses à partir de rien. A la base « Les animaux fantastiques », ce n’est qu’un bestiaire, une liste de noms de créatures avec leur niveau de dangerosité. Rien de plus. Il n’y a même pas d’histoire à proprement parlé (toutes les connaissances que les Potterhead ont sur Norbert Dragonneau viennent de ce que J. K. Rowling a distillé sur le défunt Pottermore). De fait, partir de là pour faire cinq films (oui, cinq !), on devine tout de suite que ça va être un peu juste.

A contrario, il y a effectivement bien plus de matériel concernant Albus Dumbledore. Qu’ils se soient lancés là-dessus plutôt que sur l’histoire de James et Lily Potter, pour étayer un peu le vide scénaristique qu’est la vie de Dragonneau, je ne suis pas contre. Simplement, la production s’y est pris comme un manche et on se retrouve avec trois histoires imbriquées en une (celle de Norbert, celle de Dumbledore et celle de Croyance), saupoudrées de fan-service inutile (Nagini, McGonagall).

Je pensais avoir vu le pire traitement de personnages avec la dernière trilogie Star Wars, mais en fait, le troisième volet des Animaux Fantastiques lui tient la dragée haute. Clairement, les scénaristes ne savent plus quoi faire de leurs personnages : entre ceux qui auraient dû être sur le devant de la scène et qui se retrouvent relégués au second plan (Norbert, Croyance), ceux qui font tapisserie (Thésée, Lestrange) et ceux qui ont mystérieusement disparu (Nagini, Tina), ça fait beaucoup d’écueils pour un film qui a mis tant de temps à sortir. Surtout que viennent s’ajouter à cela des incohérences à foison (la scène du petit-déjeuner à Poudlard étant l’un des plus gros points d’exclamation de l’Histoire de la cohérence au cinéma) et des facilités scénaristiques à se taper le front contre un mur (le système d’élection à l’applaudimètre, c’est assez couillu comme idée, je dois dire (surtout pour élire le représentant du monde magique dans son entièreté avec deux cents péquins seulement)).

On ne va pas se mentir, ce film brasse méchamment de l’air pour pas grand-chose puisqu’on revient au point de départ à la fin. La seule histoire qui a progressé, c’est celle de Kowalski (donc, du Moldu). Franchement, à quoi bon s’acharner ? Surtout que, scénario mis à part, y’a pas grand-chose pour sauver le film. La musique est plate au possible, la photographie est très sombre (pour les myopes comme moi, c’est très fatiguant à regarder), les quelques traits d’humour sont noyés par l’afflux permanent d’informations censées t’aider à comprendre ce qui se passe et, en plus, le titre est mensonger.

C’est quoi les « secrets » de Dumbledore ? Le fait qu’Albus soit de la jaquette ? On le savait déjà. Le fait qu’Aurélius soit le fils d’Abelforth et non son frère caché ? Connaissant le premier « secret » et la saga d’origine, on s’en doute « un petit peu ». Qu’Albus projette de détourner l’attention de Grindelwald en faisant fabriquer plusieurs valises ? Ca s’appelle un plan, pas un secret.

Bref, c’est pas ouf. Je ne sais pas s’ils oseront faire la suite, mais j’économiserais une place de ciné en n’allant pas le voir.

PS : Ah, si, le seul truc bien, c’est l’alchimie entre Jude Law et Madds Mikkelsen qui marche mieux qu’avec Johnny Depp.

NicodemusLily
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Zyeutés en 2022

Créée

le 14 nov. 2022

Critique lue 37 fois

2 commentaires

NicodemusLily

Écrit par

Critique lue 37 fois

2

D'autres avis sur Les Animaux fantastiques - Les Secrets de Dumbledore

Du même critique

Le Miroir d'ambre
NicodemusLily
4

Mondial moquette chez les parallélépipèdes rectangles

Enfin ! J’ai enfin fini de lire la trilogie de Philip Pullman : A la Croisée des Mondes. Ca n’a pas été de tout repos. En effet, passée la déception du tome 2 qui glissait de manière flagrante vers...

le 14 mars 2015

14 j'aime

9

New York, Unité Spéciale
NicodemusLily
7

Ma deuxième partie de soirée fétiche

New York : Unité Spéciale, c'est une série que j'ai découvert un peu par hasard. Toujours diffusés en deuxième partie de soirée compte tenu des sujets traités, toujours diffusés dans le désordre le...

le 15 avr. 2014

13 j'aime

5

La Reine des Neiges
NicodemusLily
1

Mince, c'est Noël ! Il faut faire un film !

La Reine des Neiges, mon dernier grand traumatisme Disney. J'avais espéré - au vue de la bande-annonce - être à nouveau transportée dans le monde féérique de la souris parlante... mais c'est un...

le 22 mars 2014

11 j'aime

9