J'apprécie beaucoup cette remontée chronologique des grands classiques. C'est tellement agréable de voir toutes les évolutions de styles au fur et à mesure des années et des époques.
Disney est en péril à cette période, et ça se sent. Je crois que j'ai rarement vu aussi peu d'éléments animés dans un de leurs films, surtout dans le background. Plus que jamais, on a surtout l'impression de personnages animés (et pas toujours trop) se déplaçant dans un décor inamovible, à la façon des anciens jeux 3D.
Quelques reprises de scènes aussi pour économiser, une Médusa qui ressemble beaucoup à Cruella, Snoops fait penser à Monsieur Mouche, les crocodiles de Peter Pan...
"Les Aventures de Bernard et Bianca" (qui sonne moins bien que le titre original, mais c'est vrai que "Les sauveteurs" ne rendrait pas super bien en français) marque un déclin continu et de plus en plus visible au niveau de l'animation des studios Disney.
Fort heureusement, le film compense par une excellente direction artistique, résolument différente et plus sombre (mais toujours moins que "Pinocchio" fort heureusement). Je trouve qu'il y a une beauté qui s'en dégage, très proche des films de Don Bluth, qui a d'ailleurs contribué au film. Une simplicité aussi, certes, mais tout nous immerge dans cet univers de bayous, de crocodiles et de roseaux. Une excellente ambiance qui reste avec nous et nous fait voyager aux côtés des petites souris.
Leur relation est d'ailleurs appréciable, avec une Bianca entreprenante et qui ne cache pas sa féminité, sans que cette dernière soit caricaturée ou utilisée comme prétexte pour la rendre insupportable. Elle n'hésite pas à donner de sa personne, à se lancer au secours de la petite Penny, tout en gardant sa personnalité. Je trouve qu'il s'agit d'un très bon personnage, et un modèle très positif. Bernard quant à lui est plus timoré et timide, mais il sait aussi se prendre en charge et fonctionne à merveille avec Bianca. Un des couples les plus équilibrés et attachants de l'univers Disney, pas étonnant qu'ils aient eu droit à une suite quelques années plus tard.
J'ai aussi apprécié la petite Penny, petite fille orpheline attachante et qui fait tout à fait son âge dans ses paroles et ses gestes, et qu'on souhaite ardemment sauvée des griffes de ses exploiteurs. Si Médusa et Snoops ne sont pas des plus mémorables, ils représentent bien toute la cupidité de beaucoup trop d'adultes qui n'hésitent pas à sacrifier et à exploiter les autres, même les enfants, pour atteindre leur but.
De par son contexte réaliste (en dehors des souris qui parlent), on se sent forcément fortement concerné par le devenir de la petite, car ce sont des situations qui prennent place tous les jours, des adultes qui menacent les enfants afin de les exploiter, les manipuler et les culpabiliser. Si les deux méchants ne sont pas des icônes des méchants Disney, ils comptent sans aucune doute parmi les plus méprisables, et on se réjouit de les voir échouer à la fin.
De leur côté, Brutus et Néron apportent une dose bienvenue à la fois de tension et de comédie, notamment avec la scène des orgues où je me suis surprise à rire franchement, à la fois pleine de suspens, de rythme et des mimiques impayables de la part des crocodiles.
On retiendra aussi Orville, l'albatros un peu allumé, Evinrude, la libellule moustachue à l'orthographe impénétrable, ainsi que la souris alcolo qui boit à plusieurs reprises dans sa fiole et dont je croyais naïvement dans mon enfance qu'il s'agissait d'une boisson très épicée (aaah, l'innocence de la jeunesse).
Ce qui m'a le plus surprise en revoyant ce film, c'est que mis à part un peu le début, je garde un souvenir vivide de "Les Aventures de Bernard et Bianca". Malgré un déroulement un peu simpliste et pas énormément de subtilités ou de profondeur, en plus d'une animation qui accuse le coup, j'y ai trouvé énormément de coeur. Sans doute est-ce lié à la qualité de l'histoire originale (que je n'ai pas lue), et j'aime sincèrement cette aventure, cette ambiance, les interactions entre les personnages, et l'émotion et le rire qui se dégage du tout.
Pas un des plus grands film du studio, mais j'en garde définitivement toujours un souvenir tendre et cher à mon coeur.