Les Banshees d'Inisherin est un film d'amitié entre deux Irlandais que tout oppose. Alors que Colm décide du jour au lendemain de ne plus adresser la parole à Padraic, ce dernier va s'efforcer de maintenir un lien si brutalement coupé, contre toute espérance et toute logique. Non sans humour noir et sanglant, le film dépeint peu à peu deux personnalités bien distinctes : Colm, le mélomane taciturne qui cherche à laisser une trace, Padraic, le paysan simplet qui ne vit que pour le bonheur de ses proches. L'ambition contre la simplicité. La cruauté contre la bonhomie. Alors qu'est-ce qui pouvait bien autant rassembler ces deux êtres à ce point éloignés ? Sûrement d'être les jouets de Banshees, les observant se débattre face à la vacuité de leur vie, rêvant chacun de reconnaissance à leur propre manière. Sûrement aussi l'amour pour Inisherin, île sublimée par les plans aériens aux couleurs vers et gris. Bien aidé par des acteurs talentueux, dont le jeu évolue au gré des tergiversations de leur personnage, le film souffre tout de même de facilités romanesques qui amplifient son aspect ouvertement surréaliste, et vain. Il fallait bien cette fantaisie sanguinolente venue de nulle part pour nous divertir, nous Banshees, puisque le film s'achève sans apporter de point final à une relation qui n'aura de cesse de nous amuser, puis de nous scandaliser, enfin de nous ennuyer.