Les Desperados
6.1
Les Desperados

Film de Charles Vidor (1943)


-J'ai entendu une chanson qui parlait de l'autre côté de la montagne. Voilà où je suis depuis trop longtemps, de l'autre côté. Et je veux revenir.
-Mais le peux-tu ?
-Je veux essayer.
-On dit qu'un homme se perd quand il devient faible, Cheyenne. Si tu deviens faible, tu te mets la corde au cou.
-Je ne peux rien faire.
-Pars d'ici dès que tu le peux. Red Valley n'est pas fait pour toi. Pars vers la frontière.
-Je suis Bill Smith maintenant, plus Cheyenne, et je me plais ici.
-Tu n'es pas Bill Smith, tu es Cheyenne Rogers, pour toujours. Je suis moi aussi de l'autre côté de la montagne. On ne peut pas en revenir.
-C'est peut-être la différence entre nous.



Les Desperados est un western divertissant possédant une allure bon enfant naïf, seul western du réalisateur Charles Vidor (La Reine de Broadway, Gilda) qui signe le premier film en technicolor pour la Columbia. Même si le long-métrage chevauche parfois avec de la comédie, il fonctionne bien, ne tombant jamais dans une caricature d'humour gras. Un western plaisant et enjoué à la tonalité fortement contrastée par une multitude de péripéties continuellement employées dans le récit comme retournement de situations, empêchant l'histoire de tomber dans l'ennui par un rythme rapide. Malheureusement son ton léger n'en fait pas une oeuvre mémorable, néanmoins il contient ce qu'il faut en dramaturgie romancée pour le voir d'un autre oeil que de celui de l'humour.


Visuellement, pour une oeuvre datante de 1943 c'est superbe. Les prises de vues sont réussis par des plans rapprochés surtout autour des chevaux qui rendent le tout authentique. La photographie de George Meehan y est pour beaucoup avec un superbe éclairage des décors extérieurs avec beaucoup de plans larges. Un soin accordé à la décoration très positive, qui ne réussit tout de même pas à faire oublier son côté très conventionnel du film de cowboy. Niveau narration ce n'est pas mal du tout, certains échanges sont vraiment drôles. La présentation du générique d'ouverture et des comédiens est des plus inventifs, avec la conception d'un livre de velours rouge bordeaux dont on tourne les pages pour présenter la distribution ainsi que le contexte de l'histoire.


Les scènes d'action ne font pas dans la dentelle, elles sont nombreuses assurant un divertissement notable même si d'un point de vue technique et chorégraphique ce n'est pas incroyable. À noter la fameuse chevauchée avec tous les chevaux qui envahissent la ville, ainsi que la fameuse et traditionnelle bagarre dans le saloon qui ici se lâche pas mal avec une grosse dose de second degré. Le bar subit de lourd dégât, et le barman essaye autant que possible de sauver ses bouteilles. Durant les échanges de colts, à cause une fois de plus du ton léger, pas une fois on ne s'inquiète du sort des personnages principaux, que l'on sait vont aisément contourner un destin tragique pour se diriger vers un happy end.


Les personnages sont tous des stéréotypes ambulants, incarnés par une accumulation de stars qui se débrouille très bien. Glenn Ford (L'Enigme du Lac noir, La poursuite des tuniques bleues) en pleine montée dans sa carrière est solide dans le rôle du bandit au grand coeur Cheyenne Rogers. La plupart des actions sont déclenchées par lui, il est clairement le fil dynamique de l'histoire et vole par là même la vedette au shérif. Randolph Scott(La chevauchée de la vengeance, Comanche station), sous les traits du shérif Steve à de l'allure, seulement il se révèle très fade car trop en retrait devant le peu de chose qu'il a à faire. Il n'est pas inutile à l'intrigue, mais se résume sur peu de chose. Même les deux héroïnes ne lui accordent aucun intérêt étant totalement focalisé sur Glenn Ford.


La plantureuse Claire Trevor (La Chevauchée fantastique, Adieu ma belle) est crédible en tant que La Comtesse la gestionnaire du saloon. Une véritable source en informations et secrets que j'aurais apprécié voir un peu plus d'utilité au scénario. Evelyn Keyes (Autant emporte le vent, Le Défunt récalcitrant) se présente dans une version assez masculine qui lui va comme un gant. En tant qu'Allison McLeod, elle incarne la fameuse belle qui tombe éperdument amoureuse de son beau cowboy ténébreux. Je suis agréablement surpris de là voire utilisée lors d'une petite confrontation physique entre Ford et Scott où celle-ci se présente finalement comme la meilleure bagarreuse des trois. Une fois de plus le comédien Porter Hall (Assurance sur la mort, La Dame du vendredi) incarne un pourri convaincant, cette fois-ci avec un banquier véreux.


Edgar Buchanan (La Chanson du passé, La justice des hommes) est celui qui présente le personnage le plus nuancé (mon favori) avec une performance du comédien soignée. Il incarne le père de Mlle Allison McLeod (Evelyn Keyes) et s'avère impliqué dans les plans ingénieux du banquier pourri, qui braque sa propre banque pour mieux faire accuser d'autres, et ainsi se faire par là même acclamer des citoyens en leur rendant une partie de leur tribu en faisant croire qu'il s'agit de ses propres fonds. À mesure que que l'intrigue avance Edgar Buchanan se présente comme le personnage le plus tourmenté, apportant du drame au récit. Guinn Williams (Cowboy holiday, Les Conquérants) alias Nitro Rankin est le comique de l'histoire. Aussi fort qu'idiot il est l'acolyte de Glenn Ford et celui par qui un paquet de problème survient. Habituellement je ne suis pas fan de ce genre de protagoniste, cependant il faut reconnaître qu'il est hilarant.


CONCLUSION :


Les Desperados n'est pas un western indispensable mais s'avère être un film divertissant réalisé par Charles Vidor. Aucune spécificité grandiose à signaler, hormi qu'il s'agit du premier film en technicolor pour le studio Columbia, qui pour cette première a mis les moyens, et ça se voit dans l'ensemble des plans qui à l'époque marquaient un grand tournant visuel. Techniquement au point, un casting 4 étoiles, des personnages clichés, des actions pas toutes maîtrisées pour un rythme effréné.


Un western naïf se révélant divertissant.

Créée

le 28 déc. 2019

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