Les Doors est un des rares biopics à avoir tenté l'expérience, avoir oublié le culte iconique habituellement de rigueur dans un biopic pour se lancer dans une expérimentation sensorielle à l'image de ses personnages. Il abandonne la distance pour s'abandonner à l'ambiance de son époque et aux aspirations psychédéliques de ses créateurs, quitte à embrasser leurs divagations jusque dans les codes visuels du film ; régulièrement, la narration se tord, se dilue dans la fumée des joints et laisse le film planer avec ses personnages, entre leurs concerts (tous énormes, chargés d'esthétique hippie et de résonance saturée) et leur quotidien, basculant peu à peu dans l'excès de leur réussite. L'accent est mis sur Jim Morrison et sur son cheminement, régulièrement sabordé par ses digressions, jusqu'à la dissolution de leur groupe. Pas politiquement correct au vu de l'usage clairement excessif des drogues, mais démocrate dans ses prises de positions (les flics, ces ripoux), le film fait le choix de se laisser ballotter par la vie du groupe, ce qui lui donne une spontanéité et une certaine légèreté (à associer à toutes les trouvailles visuelles) qui assure la séduction du cinéphile. Mais rien de bien consistant dans le fond, car cette commande a préféré l'originalité formelle à un message à faire passer (difficile d'ailleurs d'en faire émerger un, tant les inspirations psychédéliques du groupe tirent dans tous les sens au fil de leur carrière). La formule est payante, et la séance se révèle plutôt être un bain de nostalgie plutôt qu'un documentaire scénarisé.