oct 2011:

Ce 3e épisode de la série s'avère beaucoup moins tarte que je le croyais. Je l'avais bien aimé quand je l'avais vu gamin, mais je craignais à une indulgence adolescente. Or, il s'avère plus riche qu'un simple prétexte à profiter du succès d'une franchise franchement plus tout à fait fraiche.

D'abord, je suis sidéré par la tenue du blu-ray. Si les deux premiers m'avaient quelque peu déçu visuellement, celui-là est éclatant dans les couleurs et d'une délicieuse netteté dans les détails. Le cinémascope lui va à ravir. Déjà, c'est un bon point qui me met dans les meilleures dispositions pour siroter le reste.

Dans mes souvenirs, je me faisais donc une idée assez schématique du film : un très bon début et progressivement une perte d'intérêt jusqu'au final reliant le film à sa suite "La conquête de la planète des singes". Si le début est effectivement remarquable, faisant un succulent contrepoint aux deux premiers films de la franchise, à ce que Taylor, puis Brent ont subi de la part des singes, un début somme toute plein d'humour et de saveur, le reste n'en est pas exempt non plus. Je découvre des aspects du film que je n'avais pas perçu dans ma jeunesse.

D'abord l'aventure que vivent Zira (Kim Hunter) et Cornélius (Roddy McDowall) répète mais de façon encore plus directe ce que les deux premières aventures avaient montré du doigt : les méfaits de la ségrégation et la violence de l'exclusion raciste. Cependant, cette fois, le propos est rendu plus complexe par des problématiques difficiles, philosophiquement parlant, à manier. Zira et Cornélius, témoins de la destruction de la Terre par la folie guerrière des hommes et des gorilles, font figures de prophètes à "double tranchant" si vous me passez l'expression. Les paradoxes de leur voyage dans le temps amènent des questions, explicitement exprimées, au coeur du film, non seulement parce qu'ils annoncent la domination des singes sur les hommes et la fin du monde, mais également parce que Zira constitue le chainon manquant entre les singes parlants et les muets : elle est enceinte, porteuse du futur premier singe parlant né sur Terre. Les humains se trouvent donc devant un dilemme cornélien : faut-il éliminer à la source, dans la violence et l'arbitraire, ce qui constitue l'origine de l'hégémonie future des singes et par conséquent du conflit apocalyptique entre hommes et singes, mettant du coup dans l'ombre la réelle responsabilité des hommes qui ont pensé et construit la bombe atomique? En fin de compte, le film prend donc une épaisseur que je n'attendais pas et me ravit.

Il y a d'autre part une teinte tragique et messianique qui n'est pas sans charme. Le couple Zira / Cornélius est très émouvant, leur parcours a quelque chose de grand, une poésie du drame et de l'intime qui me touche énormément.

L'habillage musical de Jerry Goldsmith est une nouvelle fois remarquable. Il a su marier la rudesse et la brutalité des percussions propres à l'univers de cette série à une musique plus "moderne", celle de l'époque, post-hippie, sergentpepperlonelyheartclubbandesque. Cela donne un truc pas dégueu. J'aime beaucoup la virtuosité de ce type.

Je ne m'attendais pas à prendre un petit panard cinéphile sur ce troisième opus. Je ne regrette pas l'achat de ce coffret. Ainsi, je redécouvre la planète des singes et j'aime ça!
Alligator
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le 19 avr. 2013

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