L'ambiance sombre de la salle de cinéma a quelque chose de hypnotisant lorsqu'un long métrage se lance. Après, il faut un certains temps pour entrer dans le film, comprendre les enjeux, les personnages.


Pas dans Les Frères Sisters, le film se démarre dans la nuit, l'éclat peu lumineux de la lune laisse apercevoir des silhouettes dans un silence des plus désarmants. Quand soudain, coups de feu, éclats d'étincelles, flammes incandescentes, cris de chevaux et d'hommes se laissant tomber dans une terre poussiéreuse et trempée de sang. Le ton est donné, Les Frères Sisters sera un film violent, cru, sans vergogne avec son spectateur.


Dès son introduction aussi choc que sublime, Les Frères Sisters fait bien comprendre ses intentions, c'est un film sur la violence. Celle qu'on inflige aux gens, mais aussi à soi-même, celle dans laquelle on se retrouve confronté dès le plus jeune âge, celle que des gens tentent de fuir, et que d'autres vivent avec.


De ce point de vue, les Frères Sisters n'a rien de romantique, ni même attirant, car vous ne verrez rien d'autres si ce n'est des coups de feu qui vous brisent les tympans, et des hommes sales. Mais bon sang, quelle expérience.


Qu'on soit clair, Les Frères Sisters fait preuve ici d'une prouesse visuelle ahurissante, débordante de couleurs vives, agréables à la vue, rendant le contraste avec le sang époustouflant. Si la nature, les villes, les décors semblent beaux, les hommes qui les parcourent sont sales, puants, malades, chevauchant des montures défigurées par les batailles. Et comme il faut bien une raison à tout cela, les hommes courent après une chose, l'or. Alors oui, ça peut paraître bien cliché, la vanité des hommes qui les mènent à leur perte. Sauf que là encore, le film fait preuve d'ingéniosité.


Car l'or au final qu'est-ce ? L'or est-il une finalité, ou un moyen ? Certains pensent pouvoir utiliser l'or à bon escient, pour construire un monde idéal, sans violence, tandis que d'autres n'y voient qu'un moyen de se payer d'avantage d'alcool et de prostituées. Bien évidemment, je ne vous donne pas la réponse, mais en ce qui me concerne, j'ai trouvé le final assez osé. On pourra être déçu par la tournure de la fin, de la conclusion des personnages, mais j'y trouve une certaine sincérité dans la façon de voir comment ces hommes tentent de trouver un moyen de rédemption.


Et puis bon sang, quels acteurs ! Le casting est absolument génial, mais il y en a un pour moi qui se démarque de tout les autres. C'est John C Reilly, incarnant un homme à mi-chemin entre tueur froid et sanguinaire et grand frère protecteur, face à un Joaquin Phoenix en roue libre et totalement imprévisible. A eux deux, ils forment un duo attachant, à la fois répugnant et attirants qui s'avance peu à peu dans la voie de la rédemption et la civilisation. Le second duo composé de Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed crève moins l'écran, peut-être car moins présents, mais le message qu'ils délivrent est à la fois rempli d'espoir, mais pessimiste au vu de tout les obstacles auxquels ils sont confrontés.


Mais voilà, si Les Frères Sisters a été un tel coup de cœur, c'est notamment pour sa forme irréprochable, certes, viscérale, ce qui ne plaira pas à tout le monde, mais d'une puissance rarement égalée. Sincèrement, les coups de feu dans ce film font l'effet d'une bombe à chaque fois, c'est fou la puissance qu'émanent ces séquences de fusillades. La musique de Desplat est glaçante mais incroyable, la photographie est sublime. Les Frères Sisters est une expérience folle comme on en vit rarement au cinéma, encore faut-il supporter ces effusions de sang et cette violence crue, mais en ce qui me concerne, ce visionnage fût intense !

James-Betaman

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