Tony Scott ose transposer et adapter le mythique vampire aux années 80, traduit par sa démarche clipesque l’accélération des pulsations cardiaques avant de se repaître du sang du sacrifié qui jaillit comme le fluide vital, ce même fluide qui décime les amants de la même manière que le sida. Les Prédateurs, c’est le prolongement vampirique de Blade Runner où la machine aurait cédé sa place au corps, au désir brutal de posséder autrui dans l’espoir d’oublier, ne serait-ce qu’un temps, sa condition d’immortelle. Car les corps sont ici à la fois érotiques et glaciaux, captés recouverts de strates de lumière ou figés dans la rêverie d’un temps passé, révolu et pourtant toujours présent. L’architecture – mélange de formes géométriques et de baroque – semble irréelle, et pourtant tout nous paraît si proche : un salon où il fait bon jouer de la musique, une douche où se retrouver, l’alcôve brûlante tout droit inspirée des harems orientaux. Se croisent et s’emmêlent les âges, conservés à la cave et qui emporteront celle qui les a impunément traversés, donnant naissance à une nouvelle muse par une brillante permutation Deneuve / Sarandon. Les Prédateurs, œuvre qui envoûte et fascine, parvenant à nous faire éprouver le vertige de l’immortalité. Rarement avons-nous été aussi près du vampire, et pourtant la Hammer semble si loin.