« Typically english », le chef d’œuvre de James Ivory,

Les Vestiges du jour (The Remains of the Day) est un film américano-britannique réalisé par James Ivory sorti en 1993, inspiré du roman du même nom de Kazuo Ishiguro.


Présentation
Le film alterne les séquences qui se passent en 1959 et en 1936.
En 1959, Miss Kenton (Emma Thompson), ancienne gouvernante de Lord Darlington (James Fox), récemment décédé, rédige une lettre à l’intention de l’ex-majordome, James Stevens (Anthony Hopkins). Elle y évoque un scandale qui a éclaté après la guerre ayant impliqué le comte. Afin d'aller rendre visite à Miss Kenton, Stevens obtient un congé de son nouveau patron, un riche américain nommé Jack Lewis (Christopher Reeve) qui a racheté le domaine après le décès Darlington. Chemin faisant, dans la vieille limousine Daimler que Lewis lui a prêtée, Stevens repense au jour de 1936 où il a engagé Miss Kenton.


Flash-back en 1936, où Stevens, responsable de toute la domesticité du domaine, fait engager son père au passé prestigieux comme majordome-adjoint, et Miss Kenton comme intendante. Celle-ci va se révéler une excellente professionnelle. Stevens – quadragénaire consciencieux, réservé, témoignant d'une autorité naturelle – a totalement intériorisé les devoirs de sa charge sur laquelle il centre son existence. Appréciant réellement la personnalité et la compagnie de Miss Kenton, il se refuse d'y voir une autre raison que professionnelle.


Lors de cette même année, Lord Darlington organise une conférence internationale chez lui en vue d’établir la paix avec l'Allemagne (dans le livre, cette conférence a lieu en 1923 ; en 1936, non seulement l'Allemagne était déjà remilitarisée, mais appuyait la guerre d'Espagne de toute sa force aérienne). Ses invités et lui désirent la soutenir politiquement. Seul un membre du Congrès américain, le sénateur Lewis, manifeste fermement son opposition, estimant qu’on ne peut négocier avec le diable. Pendant cette réunion, on annonce à Stevens le décès de son père mais, faisant passer ses devoirs avant son amour filial, il n’interrompt pas son service et délègue Miss Kenton pour rester au chevet de son père.


Peu avant la guerre, Stevens est forcé de licencier deux employées allemandes d’origine juive, décision qui ulcère Miss Kenton. Bien que bouleversé par la décision de Lord Darlington, Stevens ne laisse cependant rien paraître de son sentiment mais Miss Kenton, elle, menace de démissionner sans toutefois le faire. Plus tard, Lord Darlington, pris de remords (« Ce que nous avons fait est mal »), cherche à faire retrouver les jeunes filles pour leur rendre leur emploi, en vain.


Nous voici à nouveau en 1959. Dans un pub où il s'est arrêté, l'allure et les excellentes manières de Stevens le font prendre pour un respectable aristocrate par les clients, et il se laisse prendre à ce jeu : il admet avoir vu Churchill, en se gardant bien de préciser dans quel contexte. Le médecin du village n'est pas dupe et, lorsque tous deux se retrouvent seuls, pose une question concernant « le traître Darlington ». Stevens répète, fort gêné toutefois, qu'il n'avait pas à juger son maître, que chacun peut faire une erreur et que lui-même entreprend justement ce voyage pour essayer d'en réparer une.
Retour en 1939. Lors d'une autre soirée de décideurs anglais, l'un d'eux veut tester la compréhension que peut avoir le peuple de la situation internationale tendue et il questionne à cet effet Stevens, lequel est incapable de donner quelque avis que ce soit. Devant la froideur de Stevens à son égard, Miss Kenton se tourne vers Thomas Benn qui lui propose le mariage.


Lord Darlington organise une entrevue secrète entre le premier ministre anglais Neville Chamberlain et l'ambassadeur d'Allemagne Ribbentrop : la politique d'Hitler, en particulier ses visées sur la Bohême, est soutenue par tous les intervenants. Nous sommes alors bien loin de l'esprit conciliant et amical de la conférence de 1936.



  1. Vingt ans se sont écoulés : Stevens retrouve Miss Kenton. Ils discutent de tout et de rien, de son mariage raté à elle, mais aussi du procès que Lord Darlington a perdu après la Guerre alors qu'il voulait défendre son honneur. Stevens offre à Miss Kenton de revenir à Darlington. Venant d'apprendre la grossesse de sa fille, celle-ci se voit contrainte de ne pas accepter. Ils se quittent… mais les frustrations liées à leur attirance réciproque sont toujours bien présentes.


Mon opinion sur ce film


« Typically english » dans sa forme et dans son fonds, ce film restera sans nul doute le chef d’œuvre de James Ivory, un film élégant, subtil, tout en nuances, qui mêle intelligemment politique et affaires de cœur.

Roland Comte

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