D'habitude, pour ce genre de films, je passe assez facilement mon tour, tu vois. La langueur, la contemplation, ça m'ennuie assez vite si ce n'est pas exploité avec talent. Et là, tu te demandes pourquoi cet imbécile de masqué, il s'est infligé ça s'il n'aime pas...


Minute, je t'explique : j'avais une place gratuite à recycler dans les quinze jours, place que j'ai obtenue pour compenser les multiples coupures techniques subies durant The Program. Il s'agissait du dernier jour du délai, vu que, dans mon cinéma, c'est la cata ce qu'il passe en ce moment. Je vais même rater Sicario. C'est dire...


Je me pose devant le fronton où les affiches sont présentées sous verre. Au fil des "non", "non", "même pas en rêve", égrénés à mesure que je détaillais les films, je vois soudain le nom d'Anton Corbijn dont The American m'avait laissé un bon souvenir. Allez, banco pour Life, dans ce cas, même s'il y a Robert Pattinson au générique avec sa demi-expression tout droit sortie de Cosmopolis à l'avant de la voiture. Pis c'est gratuit.


Pas grand monde dans la salle. Soit des conditions idéales. Ambiance arts et essais. Les lumières déclinent et les premières minutes passent. La VOST me séduit doucement, même si la première chose que je vois, c'est Pattinson qui tire la tronche. J'attends l'apparition de la Légende. C'est avec elle que Life prend véritablement son envol. Car le film adopte la nonchalance apparente d'un James Dean affranchi des contraintes, son charisme un peu je-m'en-foutiste, son magnétisme, son succès énervant de facilité. Tout le contraire de Dennis Stock, le photographe qui détecte en cette figure montante le charisme des grands. Stock est autant sous le poids des responsabilités que Dean semble libre. Le photographe est autant tendu que l'acteur est désinvolte et ingérable.


Le film évolue avec une langueur calculée, au gré des sublimes compositions d'Anton Corbijn et de sa directrice photo, au gré de l'environnement reconstitué et des figures célèbres qui le traversent : Jack Warner, Eartha Kitt, Judy Garland, Elia Kazan... Et il reproduit par à-coups le tourment intérieur de la vedette en devenir, son attente égoïste, ses caprices, sa solitude, sa mélancolie. Life laisse le temps à un bouton de rose de s'épanouir, ce que la vie lui aura confisqué. Rien de nouveau sous le soleil de la légende, mais la mise en scène des photos les plus célèbres, une contextualisation à travers la confrontation où le photographe et l'acteur, a priori contraires, apparaissent semblables sur certains éléments de caractère, sur certaines peurs.


Et par instants fugaces, Corbijn arrive à frôler l'Insaisissable : étonnante confession lors d'un voyage en train. Retour aux sources, aux racines de l'Indiana. Une présence à un bal de promo anonyme. Et quelques mots étonnament mélancoliques. La vie de James Dean jouait sa propre musique, aux accords de jazz à contretemps, comme il tapait sur sa conga. Comme ce film au rythme incertain, seule faiblesse, mais jamais ennuyeux.


C'était pas si mal pour un choix par défaut. Au contraire.


Behind_the_Mask, qui a envie de retenter l'expérience.

Behind_the_Mask
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Une année au cinéma : 2015 et Pour moi, 2015, c'était...

Créée

le 5 oct. 2015

Critique lue 584 fois

6 j'aime

Behind_the_Mask

Écrit par

Critique lue 584 fois

6

D'autres avis sur Life

Life
Sergent_Pepper
7

Motion capture.

Il faut un minimum de culture contextuelle pour entrer dans Life, un film qui se mérite et ne cherche pas la facilité en dépit de son potentiel de séduction. Connaitre son réalisateur, Anton...

le 4 nov. 2015

28 j'aime

3

Life
Sofian_DeRochdi
6

Jimmy's Life

Mes critiques peuvent contenir des spoilers qui seront balisés. Points positifs - Les interprétations de Dane DeHaan et Robert Pattinson - L’ambiance années 50 - La mise en scène et les musiques...

le 18 sept. 2015

10 j'aime

6

Life
Frédéric_Perrinot
5

Life is strange

En seulement quelques films, James Dean était devenu une icône, une légende et un monument du 7ème art. Il avait indéniablement une personnalité fascinante et un charisme évident. Néanmoins ce qui a...

le 14 sept. 2015

7 j'aime

Du même critique

Avengers: Infinity War
Behind_the_Mask
10

On s'était dit rendez vous dans dix ans...

Le succès tient à peu de choses, parfois. C'était il y a dix ans. Un réalisateur et un acteur charismatique, dont les traits ont servi de support dans les pages Marvel en version Ultimates. Un éclat...

le 25 avr. 2018

204 j'aime

54

Star Wars - Les Derniers Jedi
Behind_the_Mask
7

Mauvaise foi nocturne

˗ Dis Luke ! ˗ ... ˗ Hé ! Luke... ˗ ... ˗ Dis Luke, c'est quoi la Force ? ˗ TA GUEULE ! Laisse-moi tranquille ! ˗ Mais... Mais... Luke, je suis ton padawan ? ˗ Pfff... La Force. Vous commencez à tous...

le 13 déc. 2017

189 j'aime

37

Logan
Behind_the_Mask
8

Le vieil homme et l'enfant

Le corps ne suit plus. Il est haletant, en souffrance, cassé. Il reste parfois assommé, fourbu, sous les coups de ses adversaires. Chaque geste lui coûte et semble de plus en plus lourd. Ses plaies,...

le 2 mars 2017

182 j'aime

23