Lions for Lambs se pense investi d’une mission éducative et civique adressée aux États-Unis comme au monde entier : interroger la notion même d’engagement en réponse à la passivité contemporaine qui, sur le mode du zapping, change sans cesse de programmes pour combler son ennui. Les différents personnages représentent ainsi les points focaux d’un axe unique rapprochant la trajectoire de soldats étudiants, d’une journaliste, d’un sénateur et d’un professeur au nom d’une seule destinée humaine tout entière contenue dans le service rendu à la nation. Cette intelligence de propos souffre pourtant d’une absence d’incarnation : à l’écran, rien n’advient sinon l’impersonnalité de la mise en scène, l’aspect sentencieux des dialogues, la caricature demandée aux comédiens. Un paradoxe naît ainsi d’un récit moralisateur pris en charge par une forme approximative et vectrice de confusion qui juxtapose sans transitions aucunes les moments de vie. Le cinéma de Robert Redford ne vaut, en somme, que pour sa capacité à s’inspirer de la nature afin d’y trouver l’écoulement du temps historique – d’où son goût pour la fresque. Qu’il est loin, ici, le Montana !