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Dolan, ah, Dolan…


Tu nous a habitués à du grandiose. Nous avons souffert avec chacun de tes personnages comme Laurence, Kyla, Louis… Nous avons vécus et endossés avec eux, nous avons su percevoir tout ce que tu as voulu nous montrer grâce à ton oeil de génie et ton empreinte stylistique indiscutable. Leurs combats et le tien, leurs émotions souvent calquées de manière très juste et intime… Tu nous a permis une sincère proximité avec ton travail cinématographique et avec les protagonistes que tu sais mettre en scène spectaculairement, grâce à ton acharnement rigoureux souvent gain d’excellence.
Je t’aime, j’aime ce que tu fais. Et c’est pour cela que j’ai bien du mal à être objective, et à apprécier ton dernier film.
Personnellement, je suis déçue.
J’ai l’impression que le Ma vie avec John F. Donovan n’est qu’une pâle représentation de ton talent pourtant incontestable.
Tout d’abord, dans l’incipidité du jeu de tes acteurs.
Des larmes de crocodile et des cris théâtrales, des dialogues sans profondeur qui ont fini par me rendre insensible au sujet pourtant pas trop con.
Nathalie Portman, incroyable dans Black Swan, n’est ici qu’une moue figée par l’indignation permanente et constamment dépassée. L’enfant, Rupert, terriblement insupportable, parait à la fois si stupide face à ces crises d’hystérie devant son feuilleton, alors que ce bambin est placé en figure moralisatrice face à sa propre mère.
C'est un enfant, ok, il s’exprime déjà comme un diplomate. Plausible mais déjà dur à avaler.


Là où ça en devient grotesque, c'est lorsqu'il débat de ces droits avec un agent des forces de l’ordre mais il est pourtant incapable d’imaginer que casser la vitre de son camarade, c’est un délit et que ce n'est non pas sans répercutions. Sacrée représentation du génie.


Le jeu d’acteur, aussi réputé soit-il, n’arrive pas à la cheville de tous ceux que tu as supervisé auparavant. On regrette le filet de bave de Vincent Cassel lorsqu’il s’énerve, ou encore les veines frontales apparentes d’Anne Dorval… Nous n’assistons qu’à un massacre émotionnelle et mimé par une flopée d’acteurs bankable.
Seul Kit Harrington est celui en lequel nous pouvons retrouver un soupçon d’empathie; au fond de ces yeux ternis et sa volonté d’échapper à la médiatisation et aux scandales qui l’assassine.
Pour ce qui est du reste, certes, tu nous a tout de même apporté quelques belles scènes, notamment, celle dans la boite de nuit, mais encore de la confrontation entre John et son amant dans la voiture. Mais elles n’ont pas la même saveur que tes précédentes.
Il m’est aussi arrivé bien souvent de reconnaitre quelques moments complètement similaires à celles de tes précédentes oeuvres. J’ai vu en cela un terrible manque d’inspiration; de quoi prouver au monde hollywoodien de quoi tu as su être capable auparavant, or, j’ai cru défaillir face à cette tripotée d’imitations que je définirais de parodique.
Nous reconnaissons ta patte, mais elle semble plus n’être que le modèle typique de ton encre Dolanienne, et tu nous la sers à toutes les sauces comme pour remplir le vide.


J’ai vraiment cru mourir de gêne durant la course-poursuite entre la mère et le fils dans Londres, tant cela n’incarnait pas ta subtilité à mettre l’émotion en avant sans pour autant nous la jeter sous les yeux de manière si grossière.


Et puis cette narration, cette relation entre la journaliste et Rupert-le-Grand; prévisible et cliché, digne des pires films du cinéma américain.
Malgré ces nombreux points faibles, cela serait mentir de dire que le film n’était pas beau. Juste beau.
Je suis certainement beaucoup trop sévère et intransigeante, il est peut-être possible que mon jugement puisse être moins formel; si ce n’était pas toi qui avait réalisé ce long-métrage, mais je sais, j’en suis certaine tu es capable de bien mieux. Tout le monde fait des erreurs, et celle-ci est une maladresse. Mais j’ai encore espoir en toi, et je suis convaincue que tu sauras à l’avenir nous émouvoir, nous impressionner, nous laisser bouche-bée comme toi seul est capable de le faire.

Sdbb
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le 19 mars 2019

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