Dès sa première demi-heure, Maléfique : Le Pouvoir du mal tente une quantité de choses non négligeable mais patine lorsqu'il doit faire avancer son intrigue. C'est du moins ce qu'on ressent durant ses deux premiers actes très communs, construits suivant le schéma classique des comédies romantiques : deux amants à l'amour qu'on croit au départ impossible, la promesse d'une vie de couple heureuse entravée par la survenue d'un élément perturbateur : Michelle Pfeiffer qui signe son retour en salles avec son troisième film Disney en deux ans.


Soyons d'accord, tout est si attendu que c'en est presque risible, que l'on se consacre à analyser la caractérisation des personnages ou la structure de l'intrigue : le déroulé classique du divertissement pour enfants des années 2010 est respecté à la lettre, et peut rapidement devenir exaspérant pour toute personne qui en attendrait autre chose qu'un film primaire aux jolies images de synthèse jetées à la volée sur une palanquée de plans d'art-work et de beaux sentiments à la naïveté sans limite.


C'est en même temps ce qu'était le premier volet, derrière ses faux airs sombres et la tentative feinte d'en faire un conte pour "les grands"; il n'est donc pas étonnant que celui-ci reprenne cette approche du fantastique pour enfants, et qu'il poursuive l'entreprise jusque dans ses retranchements les plus obscurs. Il prolonge son délire si loin qu'il termine par perdre de vue la dimension initiale de la franchise, et le voile de pseudo-matûrité qu'elle faisait fi d'apporter au genre.


Pas plus mal, d'un autre côté, qu'il ne joue plus à ce qu'il n'est pas, et assume entièrement la direction discrètement empruntée par le premier opus : faire un film pour enfants sans plus leur faire croire qu'il est aussi destiné à ceux qui en attendent un divertissement pour adultes. De toutes les manières, la présence au casting d'Angelina Jolie, à la morphologie drôlement modifiée par le biais du numérique, suffit à replacer les parents dans leur zone de confort.


L'actrice, reflet d'une époque et de ses icônes, campe son personnage aussi bien qu'elle le faisait précédemment, avec charisme et malice. Elle joue pour beaucoup dans l'attachement qu'on ressent envers les autres personnages (particulièrement celui campé Elle Fanning, auquel elle donne une toute autre épaisseur) et dans notre implication concernant cette intrigue éventée par des twists prévisibles.


Intrigue qui s'associera à la réalisation pour effectuer un pillage en règles, et sans aucune retenue, de films et de séries qui furent en vogue : l'épisode des Noces pourpres de Game of Thrones (toute mesure gardée concernant la violence du twist, bien sûr), l'animal de compagnie des Animaux Fantastiques version Sonic, mais aussi cette esthétique Disney qui tire trop sur les couleurs de Blanche-Neige et le chasseur, et le design de l'univers, les plans de vol, de forêt et des charges aériennes du culte Avatar de James Cameron.


Ce melting-pot aux allures de foutoir numérique baveux forme cependant un tout compact et convaincant, particulièrement pour ce qui est d'enrichir son univers : l'entrée en scène des fées noires, avec ses seconds couteaux fameux (Ed Skrein et Chiwetel Ejiofor en tête de liste) développe le personnage de Maléfique en enrichissant le lore de la franchise. Si l'on se serait bien passé d'origines douteuses et des nombreux emprunts aux innovations graphiques (et techniques) d'Avatar, l'ultime combat que les fées noirs insèrent dans l'intrigue mérite bien de passer outre l'inspiration évidente de la prise de Minas Tirith.


Les jolis sentiments, les beaux décors numériques, la présence toujours agréable d'Angelina Jolie en tête d'affiche font oublier, sous condition d'y être sensible, la prévisibilité de son scénario, ses retournements de situation attendus et la rédemption niaise de ses personnages au double-visage, en même temps que le manichéisme absolu de son univers (c'est le principe) et le manque de profondeur des rapports que les protagonistes entretiennent entre eux.


Loin d'être autre chose que du cinéma de divertissement brut, Maléfique : Le Pouvoir du mal perpétue avec une certaine malhonnêteté, il faut l'avouer, l'univers d'une franchise dont le concept de base était pourtant très prometteur. Cela accepté, il faut lui reconnaître des qualités divertissantes qui, considérées le bon jour à la bonne heure, permettent de passer un bon moment en souvenir du bon vieux temps où l'on découvrait le précédent. Il n'est pas certain, cela dit, que vous serez aussi indulgent si vous le voyez le mauvais jour.

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le 4 mai 2020

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FloBerne

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