En 1999, deux auteurs signaient un film de fin de siècle qui allaient s'avérer être une référence incontournable du cinéma, de la science-fiction et de l'action : les Wachowski sortaient alors Matrix, une plongée dans un monde où la réalité n'est pas celle que l'on croit. En puisant autant dans une imagerie cyberpunk que dans le cinéma d'action asiatique, les blockbusters portés par Keanu Reeves, Carie-Ann Moss et Laurence Fishburne avait été des succès instantanés. Matrix (1999) avait rapporté 465 millions de dollars dans le monde pour un budget estimé à 63 millions, Matrix Reloaded (2003) 739 pour 150 millions et Matrix Revolutions (2003) 427 pour 150 millions.
18 ans plus tard, Lana Wachowski retouche à son chef d'oeuvre, sans sa soeur Lilly, et propose un 4e opus du nom de Resurrections. On retrouve plusieurs acteurs emblématiques de la franchise au casting : Keanu Reeves et Carie-Ann Moss, mais aussi Jada Pinkett Smith et Lambert Wilson. D'autres font leur apparition pour la première fois dans la matrice : Yahia Abdul-Mateen II, Neil Patrick Harris, Jessica Henwick, Priyanka Chopra Jonas et Jonathan Groff.
Matrix Resurrections nous replonge dans deux réalités parallèles : celle de notre quotidien et celle du monde qui s’y dissimule. Lequel est vrai, lequel est faux ? Et surtout, n'y a-t-il pas un air de déjà-vu avec un film sorti il y a 23 ans ? Faire un film entre la suite et le reboot deux décennies plus tard, est-ce bien sérieux ? Le film de Lana Wachowski dynamite les interrogations que l'on peut se poser de prime abord sur la pertinence de relancer une machine qui avait trouvé conclusion vingt ans plus tôt avec Matrix Revolutions.
L'auteure donne une dimension meta absolument jouissive à son nouvel opus, qui lui permet de se distinguer de la masse hollywoodienne : oui, Resurrections est une suite d'un blockbuster à succès. Non, il n'est pas de ceux qui reviennent en délaissant la créativité au profit de l'opportunisme. S'il y a nostalgie, elle ne fait pas tout. Resurrections commence par une scène semblable du premier opus. En tout point ? Non : un visage change, un point de vue diffère, rien n'est jamais identique à souhait mais tout est semblable en tout point. "On connaît cette histoire. C’est comme ça que tout commence", dit même l'un des protagonistes. Rien n'est laissé au hasard.
Matrix Resurrections repense l'idée même de ce que peut être une suite au cinéma, de l'industrie hollywoodienne en général et plus largement de ce monde ultra-connecté mais toujours aussi divisé.
Resurrections ne délaisse pas l'action et continue d'en mettre plein les yeux, notamment dans une scène finale à moto à couper le souffle. Surtout, le film séduit en s'amusant à déconstruire ce qui a fait le style Matrix (notamment le fameux bullet time dans une scène intense avec Neil Patrick Harris).
Enfin, le film de Lana Wachowki prend une tonalité particulière dans sa partie romantique entre les personnages de Neo et Trinity, allégories modernes de l'Amour portées avec brio par l'alchimie entre Keanu Reeves et la trop rare à l'écran Carie-Ann Moss.
Spectaculaire et intelligent, en permanence déroutant, ce nouveau Matrix est un très grand film.