‼ ATTENTION SPOILERS ➔ CRITIQUE 'MATRIX RESURRECTIONS'

Attention, Matrix Resurrections n'est pas un Matrix 4. Matrix Resurrections semble volontairement se moquer, non seulement de l'industrie Hollywoodienne, mais aussi du public qui continue d'alimenter la machine des reboots, sequels, remakes (façon Star Wars : Le Réveil de la force). D'ailleurs, plusieurs fois dans le film, le "grand méchant" (l'Analyste incarné par Neil Patrick Harris) fait référence aux gens qui se laissent mener par le bout du nez en utilisant le terme de "Moutons".


Il faut savoir que, dans ce film, Thomas Anderson (Neo) a été réintégré à la matrice et y est maintenant un créateur de jeux vidéos dont la licence qui l'aura rendu célèbre ─ dans cette "réalité" ─ n'est autre qu'une trilogie de jeux appelés... "Matrix"... Dès le départ du film, le PDG de cette entreprise (Jonathan Groff, nouvelle enveloppe corporelle de l'Agent Smith) convoque Neo, l'informant que les studios Warner (dont sa société de jeux vidéos est une filiale) souhaitent que Thomas lance la création d'un 4ème jeu, Matrix 4 donc, dans un but purement mercantile et que, dans l'éventualité d'un refus, rien ne les empêcherait de le faire sans lui. C'est d'ailleurs à ce moment précis que le personnage joué par Jonathan Groff glisse à Neo que réaliser cette suite "s'agit de leur avenir, ce qui est un sujet épineux compte tenu de leur passé", semblant indiquer par là que les enjeux de cette suite sont motivés par autre chose que la seule volonté artistique et ce malgré le risque de nuire au mythe de la franchise originale. Il poursuit d'ailleurs en parlant de la difficulté du marché dans l'industrie du divertissement moderne qui, pour se maintenir à flot, a totalement cédé à l'habitude de continuer "à raconter les mêmes vieilles histoires, mais avec des noms et des visages différents."


Les bases sont posées. Matrix Resurrections est une critique du Hollywood moderne qui semble en cruelle panne d'idées en réutilisant sans cesse les vieilles formules pour en changer quelques détails et vendre au public un semblant de nouveauté. Critique également du public qui, comme moi, sortira de la salle en se disant : "OK...Fan de la première heure, là, je me suis bien fait arnaquer".


Bien sûr ce, Matrix Resurrections repose sur beaucoup d'éléments des premiers opus, des éléments et personnages qui sont souvent totalement désacralisés, voire même tournés en ridicule (Morpheus, le Mérovingien, etc)... Alors oui, cela donne des passages parfois drôles, parfois déstabilisant, mais l'utilisation de cet écho du passé dévoile clairement l'envers du décors : nous sommes dans quelques chose de volontairement trop conscient de lui-même, à la limite de la comédie. Et tout cela, le Mérovingien le dit lui-même dans ce 4ème volet en s'adressant à Neo (élément de nostalgie par excellence, ici) : "Avant nous avions de la grâce. L'art, les livres, les films. Tout était meilleurs. L'originalité comptait. Nous avions du style, de vrais discours ! C'était autre chose que ce que nous sommes en train de faire là ! C'est à cause de toi ça... Regarde-nous, tu as tout gâché !" Ce qui est intéressant, c'est que, précédemment, dans la même séquence, le personnage de Lexy demande à Berg (qui est introduit comme LE fan inconditionnel de l'élu) ce qu'il pense de Neo, ce à quoi ce dernier répond : "J'étais un peu inquiet au début parce qu'il est plus vieux. La barbe et les cheveux longs... Mais finalement, ça le fait!" Une réponse qui n'est pas sans rappeler les inquiétudes des fans lorsqu'ils ont découvert le look de Keanu Reeves, très "John Wick", sur les première photos de tournage de ce dernier Matrix. C'est comme si tout était matérialisé dans cette séquence : La suite sans réelle utilité et l'accueil sans surprise d'un public qui préfère regarder quelque chose de peu savoureux, plutôt que de ne rien regarder du tout, au simple prétexte que cela fait appel à une certaine nostalgie. Et c'est si évident ! La scène se terminera par le départ du Mérovingien qui évoquera, sans subtilité aucune, être dans rien de moins qu'un vulgaire spin-off.


Tout aussi évident que c'est un choix qui apparaît totalement assumé de la part de Lana Wachowski, un choix dans lequel elle semble nous dire: *"j'aurai pu vous proposer un vrai Matrix 4 et vous faire croire que nos intention étaient pures, mais j'ai eu envie d'ouvrir les yeux des moutons que vous êtes et vous montrer qu'il y a autre chose au delà de cette Matrice. Une vérité cruelle qu'il va vous falloir digérer."*


Alors oui, j'étais déjà bien conscient de ce cruel manque d'idée de la part d'Hollywood et de cette incessant recyclage de vieilles formules ─ cela fait d'ailleurs bien longtemps que je ne vais plus que très rarement au cinéma ─ mais ici, Lana Wachowski l'illustre très clairement avec ce Matrix Resurrections qui n'est pas vraiment un film mais une véritable critique.


Au sortir de cette projection, je suis très partagé entre le fait de me dire que je trouve ça génialissime, de la part de Lana Wachowski, d'avoir eu l'audace de se moquer d'Hollywood et de Warner Studio dans un blockbuster hollywoodien produit par les Studios Warner, et la déception d'avoir été complètement "baladé" par l'idée que l'on allait me proposer un vrai Matrix 4 alors que ce n'est finalement qu'un prétexte à la critique. Lana Wachowski est, ici, dans la déconstruction de son propre mythe Matrix, déconstruisant de façon détournée le mythe Hollywoodien moderne.


Certains apprécieront, beaucoup détesteront... Personnellement, je suis entre les deux avec un goût prononcé de déception tout de même, malgré le plaisir d'avoir retrouver des personnages que j'aimais, au sein d'une belle esthétique et de belles scène d'action. Mais ce n'est pas vraiment Matrix.

LudoDRodriguez
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le 22 déc. 2021

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