Si tu bandes, jouissance ; si tu débandes, patience !

J'ai vu "De battre mon coeur s'est arrêté" avant de même connaître ce "Fingers". J'avais accroché sur le film français. J'ai eu pas mal de flashback durant la vision de cette version américaine. C'est d'ailleurs amusant de voir que pour une fois ce n'est pas l'oncle Sam qui se réapproprie un matériel francophone.

Autre phénomène amusant : d'habitude, lorsque les américains reprennent un film étranger, il n'est pas rare qu'ils se montrent moins cruels que els auteurs d'origine et qu'ils délivrent ainsi un happy ending (ce n'est pas péjoratif) ; ici, ce sont les français qui se seront montrés plus niais puisque Audiard termine son film sur une note positive. En tous cas nettement plus optimiste que Toback.

L'analogie est donc inévitable. On retrouve des éléments communs aux deux films. Mais là où l'exercice d'adaption ou de remake devient intéressant, c'est lorsque l'auteur se réapproprie le sujet, et donc les thèmes. Un exemple frappant, le rôle de la mère et du père. D'ailleurs la mère est encore vivante dans cette version-ci, pas dans la française. Cela donne un tout autre sens lors de la bagarre finale dans les escaliers : lorsque Harvey écrase le sexe de l'adversaire, la significations est bien plus forte que lorsque Romain le fait. Il y a aussi ce thème sur la sexualité bien plus personnel à Toback qu'à Audiard qui, lui, oubliera de traîter de cette partie.

"Fingers" est intéressant dans son épuration. Il ne se passe pas grand chose et les objectifs se mettent en place tout doucement. Ils semblent moins approfondis concrètement parlant que dans la version française ; pourtant, au niveau psychologique on arrive à une issue aussi poussée chez l'un que chez l'autre. En fait, j'ai préféré le dernier tier dans ce film. Ca bouge plus, l'étau semble se resserrer pour le héros qui cherche sa porte de sortie. Le début est sympathique mais peut-être un peu plus mou.

La mise en scène est assez classique, sobre. Après avoir découvert "De battre mon coeur s'est arrêté" on en vient à regretter que l'esthétique ne soit pas plus travaillée ; ce n'est pas assez glauque visuellement, et ça manque d'ambition dans le découpage. Ou bien est-ce le ton juste? Je m'interroge. Cette épuration au niveau d ela mise en scène permet d'entre plus vivement dans le sujet et insister sur l'aspect glauque aurait été un peu ennuyant surtout en ce qui concerne les scènes comprenant Jim Brown. Donc peut-être qu'au fond ce n'est pas plus mal si Toback est resté sobre.

L'interprétation est réussie. Duris s'inspire clairement de Keitel pour composer son personnage ; ce dernier semble habité par son personnage, au point de bien vouloir croire en ses talents de pianiste.

Bref, "Fingers" est un honnête divertissement. Je regrette que le début soit un peu mou, mais sur l'ensemble Toback traite de sujets intéressant et de manière intéressante. D'ailleurs c'est un peu triste pour lui qui n'a plus renouvelé un tel succès critique jusqu'à ses deux documentaires "Tyson" et "Seduced and abandonned". Notons aussi que le titre anglais "Fingers" me semble aussi beau que le titre du remake français "De battre mon coeur s'est arrêté".
Fatpooper
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le 4 août 2013

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