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Je ne sais pas si mes attentes sur Heavy Metal se basaient en réalité sur l’aura du film ou de la revue française dont il est tiré. Sans doute un peu des deux, mais ma référence mentale directe reste cette scène de South Park où Kenny, après avoir cheesé (c'est-à dire renifler de la pisse de chat) se met à s’halluciner en héros guerrier troussant de la nana à gros tétés. J’ai toujours cru cette scène parodique, mais elle est en réalité peu-ou-prou à l’identique dans le film produit par Ivan Reitman. Et c’est très problématique
Car oui, on pourrait arguer que Heavy Metal se veut capsule d’une certaine frange geek à une certaine époque. Un trip psychédélique dans une hybridation de SF et d’heroic fantasy sur fond de hard rock proto-métalleux à l’influence certaine sur une génération entière de créateurs hors du cadre. On pourrait effectivement arguer ça, mais ça serait faire l’impasse sur une palanquée de défauts et de choix douteux qui ne relèvent pas seulement d’un vieillissement visible ou d’un budget limité.
Ce qui pouvait fonctionner dans les pages Moebius, Dionnet ou Druillet, voire même dans la réappropriation américaine de Métal Hurlant où figurait H.R. Giger, n’est ici pas adapté à l’écran, où tout manque cruellement de dynamisme et frôle l’amateurisme en termes d’animation. Rares sont les scènes à sortir du lot grâce aux mélanges de techniques alliant rotoscopie, maquettes, live action, dessins et caméras multiplanes : on comptera l’introduction et la scène figurant sur l’affiche du film. Deux scènes qui semblent avoir phagocyté tout le budget et les talents des animateurs tant tout le reste ne fonctionne pas. Il n’y a jamais de notion d’échelle, de profondeur ou de topographie dans les décors, tout se regardant avec une exaspérante platitude. Alors certes, les designs en eux-mêmes sont parfois inspirés et s’inspirent directement de la revue française, mais ils sont desservis par une technique cheapos et des idées puériles où l’on nous sert ad nauseam des bimbos à oilpé aux boobs énormes et des gros muscles.
S’en dégage un sentiment de complaisance dans le cul facile et la violence gratuite : c’est rare que ça me dérange comme ici, mais Heavy Metal se croit vraiment trop “cool” et subversif pour que son simple délire d’adolescent en rut passe. Et comme en plus c’est laid…
Alors on enchaîne les sketchs avec toujours ce leitmotiv libidineux et gras:
- 1er sketch : parodie (involontaire) de film noir (voix off, affaire de conspiration, flics ripoux et des femmes fatales faciles) à la SF complètement datéé et sans inspiration (on met des trucs qui font bip-boop et des anneaux sur les tours et hop, c’est le turfu !)...
- 2ème sketch : parodie (involontaire) du récit d’aventure initiatique sous forme de fantasme d’un geek puceau devenu alpha male irrésistible. Entre d’autres termes : une pure beauferie…
- 3ème sketch : parodie (involontaire) de film de procès qui tourne au film de traque avec une musique complètement décorrélée de l’action…
Et ainsi de suite sur une heure de film. Il n’y a vraiment que le dernier segment qui fonctionne car il prend le temps de poser son univers et son ambiance, d’incarner son héroïne en cérémonialisant son rhabillage (certes léger et temporaire) et en faisant une icône guerrière portée par la musique d’Elmer Bernstein.
Heavy Metal me fait réaliser qu’en fait, j’aime pas Reitman. Pourtant, à balayer du regard sa filmographie, ça aurait dû être une évidence tant je n’aime aucun de ses films, qu’il en soit réalisateur ou producteur. Même les Ghostbusters qui font de Bill Murray un héros alors que le personnage est toxique comme pas permis. Mais le statut culte de certaines de ses œuvres semble avoir jeté un voile de déni sur mon esprit, me poussant sans cesse à retenter ma chance avec lui. Que cela cesse !