Avec Steven Spielberg il y a toujours du bon comme du mauvais, et c'est parfois dur de différencier l'un de l'autre.
Minority report est un mythe de science-fiction futuriste, un de ces films qui peint un monde meilleur, pour ensuite montrer qu'il est l’extrême néfaste de ce que nous avons aujourd'hui, en le tournant en dystopie mélo-dramatique. Je pourrais citer I-Robot du même genre.
La sur-sécurité, le contrôle du danger poussé à son paroxysme, rendant la réalité toujours plus mathématique, explicable, au dépend de l’ineffable des sentiments et des émotions humaines, vecteur d'une dimension aléatoire et imprévisible de l'existence. Au début c'est bien, ça empêche des meurtres, ça préserve des vies, mais finalement c'est ce qui détruit un peu plus notre humanité, cette volonté de tout contrôler, cette fâcheuse tendance à se prendre pour des dieux, comme l'analogie est d'ailleurs annoncée au début du film. Parce que l'Homme et sa complexité ne sont jamais totalement assimilables, et les prédicateurs ne sont pas immunisés de l'erreur humaine, car eux même sont des humains qui ne sont par ailleurs pas traités tels quels. La morale est simple mais on ne lui en veut pas.
Pour moi en terme de scénario ça reste une réussite, embarqué du début à la fin le film est très bien rythmé (je me retiens de cracher sur la qualité de certaines scènes d’action), le twist est efficace et la structure générale bien équilibrée. Certains critiquent son caractère de "tiré par les cheveux", mais les quelques faussetés à trouver ne sont selon moi que pour ceux qui ont choisit de ne pas aimer le film. Certes Colin Farrel qui confie au grand patron que le véritable coupable est un haut placé, c'est un peu too much, et on pourrait trouver des failles dans la logique des prédictions, et les flics qui repartent après avoir sauvé Anne Lively en la laissant seule pour que le plan de Lamar soit bien réalisable, c'est encore mal défendu, et OUI JE VOUS L'ACCORDE ça commence à faire beaucoup, mais chut... Si il y a un truc qui fait de ce film un classique, c'est bien son histoire.
On pourrait aussi citer sa qualité visuelle, pour l'époque, mais l'univers bien que cohérent et esthétique, aidant à s'embarquer dans le récit, n'est pas le point qui m'ai le plus marqué. Certains plans m'ont même dérangé, par leur désir d'esthétisme malvenu, et d'autres idées préconçues comme le technicien sur-humanisé qui se balade en short et chemise (dans une espèce de labo...), piètre cliché stylistique. Ou cet employé de justice au passé de croyant qui embrasse son médaillon, si ce n'est pas limite dans le stéréotype ça...
Cependant ce personnage captive mon attention, il est l'incarnation de la morale du film, à savoir où se cache le bien et le mal, dans et entre la justice et la foi, dans et entre le désir de réussite personnelle et le bonheur du plus grand nombre, à l'image de Lamar. John n'est que le lien entre tout ça, l'intermédiaire qui répond aux questions, mais ce n'est pas son personnage et son histoire qui donnent du sens aux questions que pose le film, et c'est en ça qu'il est intéressant. Seul le doute qui plane sur la mort de son fils apparaît comme l'allégorie de l'humanité, dans ce qu'elle a de fragile et d'inexplicable mais de puissamment vrai.
Pour résumer ce film d'anticipation est une réussite, un univers S-F crédible, un scénario entraînant qui fait honneur apparemment à l'oeuvre qu'il adapte, une réalisation (hollywoodienne) jolie bien que pas parfaite, des interprétations somme toute correctes, et une bande son pas excitante mais qui fonctionne.
Un bon 7 sur 10.