Dès les premières images – voire dès le générique, baigné d’une atmosphère à la fois onirique et inquiétante –, Miss Peregrine et les enfants particuliers nous plonge corps et âme dans l’univers si reconnaissable de Tim Burton. Mystères, monstres difformes, enfants décalés et poétiques : tout y est. Jacob Portman (un Asa Butterfield convaincant), adolescent banal en quête de réponses, devient le fil conducteur idéal pour explorer ce monde à la fois merveilleux et sombre, où chaque enfant possède un don aussi fascinant qu’étrange. L’immersion est immédiate, presque hypnotique, portée par une Eva Green magistrale en Miss Peregrine, à la fois élégante, mystérieuse et profondément humaine.
Les deux premiers tiers du film sont remarquablement construits : l’exploration de la maison de l’île, les secrets des enfants, les cauchemars qui prennent vie… Burton y déploie tout son talent pour mêler fantaisie gothique et émotion sincère. Les personnages, tous incroyablement justes (à l’exception peut-être de Barron, un peu trop caricatural), sont attachants et complexes, chacun avec sa singularité.
Mais voici le hic : si le scénario captive pendant la majeure partie du film, la dernière partie déçoit. L’affrontement final, avec ses squelettes grotesques et ses boules de neige, tombe dans un enfantillage qui jure avec la noirceur poétique des débuts. Pire, Samuel L. Jackson, en méchant trop excessif et ridicule, gâche une partie de la tension accumulée. On aurait aimé s’arrêter au moment où Jacob quitte la maison de l’île, sur une note mélancolique et mystérieuse… Las, le film bascule dans un combats spectaculaire mais creux, comme si Burton avait cédé aux codes du blockbuster au détriment de la subtilité qui faisait la force de son récit.
Pourtant, malgré cette fin en demi-teinte, l’univers reste magique, les décors sublimes, et l’alchimie entre les personnages toujours aussi envoûtante. Miss Peregrine reste une plongée délicieuse dans un monde où la différence est une force, même si on en ressort avec un léger goût d’inachevé – celui d’un film qui aurait pu être encore plus grand s’il avait osé rester fidèle à son atmosphère initiale jusqu’au bout.