Quel audace de s'attaquer à Molière après le merveilleux et très long film d'Ariane Mnouchkine ! Casse-Gueule et pourtant réussi. La parti-pris et le pari de Laurent Tirard est toutefois habile et futé : Piocher dans les œuvres de l'auteur pour en extraire des personnages et des situations supposées vécues par le Maitre et en avoir nourri son inspiration . Ainsi, il imagine le jeune Poquelin sorti de sa prison du Chatelet ou il croupit pour dettes (fait réel) par un riche bourgeois (un certain Mr Jourdain) qui lui demande de lui donner des leçons de jeu, de maintien, d'écriture pour séduire une belle aristocrate coquette (Célimène). Or, le Jourdain en question a une femme qui en plus d'être belle a du bon sens (comme celle de la pièce) et de l'intuition et va savoir mettre le jeune Poquelin amoureux sur la voie de son vrai talent. Outre le plaisir des amoureux de Molière à retrouver in situ, détournés ou réinventés les répliques célèbres de telle ou telle pièce, de les entendre sonner différemment, il y a une vraie jubilation à cette fable fantaisiste "qui aurait pu" être vraie. Romain Durys surpend agréablement par sa fantaisie et son inventivité, (Ah le scène du cours d'Art Dramatique , façon Actor's Studio et les improvisations sur le cheval !!!! c'est un grand moment) .Fabrice Lucchini est proprement génial de naïveté et de simplicité: son humiliation , déguisé en femme dans le salon de Célimène est tout simplement déchirante . Edouard Baer donne à un Dorante manipulateur et crapuleux tout son charme de voyou aristocrate, c'est un plaisir de voir ici le cinéma rendre hommage au théâtre. un film que j'ai eu grand plaisir à revoir et à faire découvrir.